Théâtre de la Ville

Dancing Teen Teen, Eun-Me Ahn

L’année France Corée a commencé sous la bannière de la jeunesse, ce mercredi au théâtre de la Ville. La chorégraphe coréenne est à l’honneur puisqu’elle vient avec trois pièces dont la lecture des titres évoque immédiatement Pina Bausch : Dancing Teen TeenDancing Middle-Aged Men et Dancing Grandmothers. Trois générations, comme pour dire quelque chose de la société d’aujourd’hui et de la danse d’aujourd’hui. Un titre prometteur, une surprise étonnante.

Dancing Teen Teen

 

En donnant la parole à ces jeunes ados, Eun-Me Ahn a transformé la scène en boîte de nuit sud-coréenne. Ambiance pop, couleurs acidulées, défilé de costumes toujours plus déjantés, chaussettes hautes, perruques blondes platines, détournement de l’uniforme scolaire, musique techno allant jusqu’à la K-pop, on peut dire que ça bougeait au Théâtre de la Ville. On se dandinait sur nos sièges en regardant ces ados se déhancher comme en club. C’est bien cela le style de cette pièce : chorégraphie de vidéos-clips, hip-hop de rue, tecktonik, petits pas qui rythment simplement la musique. Le ton est donné. On regarde ces ados se  déhancher, courir, sauter, chacun dans sa bulle. Comme on dit en Asie « same, same, but different ». On danse ensemble mais sans l’être.

La danse s’arrête net pour laisser place à un film un peu long (quinze fois trop long) où des adolescents dansent dans la rue. Le public, oscille entre la gêne et la moquerie. Il rit des pas de danse un peu gauches. Ou des observateurs dans la rue. Je me suis assez ennuyée pendant ce long moment. J’ai repensé à une conférence de Jean-Luc Nancy qu’il avait intitulé « Pas de danse ». Il parlait des lieux où l’on ne danse pas habituellement, comme la rue par exemple. Amusant de voir à quel point les rires se multipliaient en voyant les mêmes pas de danse que dans la première partie, certes plus maladroits, mais les mêmes, comme si cette succession de pas de danse avaient composé la chorégraphie principale.

C’est avec soulagement que la scène reprend le dessus. Un moment très bauschien où les adolescents se succèdent au micro, défendant une sorte de « 10 commandements de la jeunesse ». Toute l’adolescence est sous nos yeux, dansant, embrassant le public, jouant à des batailles d’oreillers et ne sachant que faire de l’avenir qui s’offre devant elle. La fête bat son plein, le public rejoint les danseurs sur scène. Folle soirée !

Dancing Teen Teen c’est jusqu’au 25 septembre, au Théâtre de la Ville, clic

Vortex temporum Anne Teresa de Keersmaeker #2

Anne Teresa de Keersmaeker est de retour au Théâtre de la Ville avec Vortex Temporum, présenté du 28 avril au 7 mai. La pièce est la suite de la traversée de l’histoire de la musique que fait Anne Teresa de Keersmaeker depuis quelques années. Cette fois-ci, elle explore la musique contemporaine de Gérard Grisey, qui évoque dès les premières notes de nombreuses images, des nuances, du mouvement. On comprend le choix de la chorégraphe belge, qui donne à voir de nouveau, une petite merveille chorégraphique. Avec Bostjan Antoncic, Carlos Garbin, Marie Goudot, Cynthia Loemij, Mark Lorimer, Julien Monty, Chrysa Parkinson, Michael Pomero, pour les danseurs et l’ensemble Ictus, dirigé par Georges-Elie Octors. Retour sur la soirée du 29 avril.

Vortex Temporum

 

L’entrée dans la salle du théâtre me rappelle le premier programme de la saison. Partita 2 était présenté à l’automne. Cette conversation dansée entre Boris Charmatz et Anne Teresa de Keersmaeker suivaient des cercles de craies tracés au sol. Là encore, on retrouve les cercles magiques et on imagine déjà de longues courses qui se feront et de déferont.

Le spectacle commence par la musique. Les musiciens s’installent – ici pas de cérémonie, on s’assoie et la musique démarre. Dès les premières minutes, la musique est très forte et très évocatrice. Elle est changeante, elle bouge en se diffusant à travers la salle. Les tonnerres du piano oscillent au milieu des souffles intenses des vents. Le public est captivé. La musique devient orageuse, l’archet s’étire sur les cordes tandis que les flûtes piaillent. Les musiciens quittent la scène, le pianiste reste. Seul, quelques dernières notes avant de quitter la scène à son tour.

 

Vortex Temporum ATDK

Les danseurs entrent. Habillés de noir et en basket, ils débarrassent les chaises. Ils ’emparent de l’espace et se placent en demi-cercle. Un demi-cercle de plus. Anne Teresa de Keersmaeker a un sens très particulier de la scène et tout prend une signification à chaque mouvement. Le silence qui les entoure semble mystique. Les corps sont ancrés dans le sol et bougent de façon presque imperceptible. Puis, un danseur plie ses jambes très rapidement. Il se redresse, puis un autre prend le relais. La danse prend place, dans ce silence, et on n’attend plus que le retour de la musique pour voir et entendre les tourbillons.

La réunion des deux univers forme une ensemble très fascinant. Les danseurs entrent peu à peu dans une sorte de transe circulaire, où ils vont d’avant en arrière, puis d’arrière en avant. On ne peut pas suivre une logique particulière tant leur chemin semble complexe. Le courbe des dos se reflètent dans les courbes du sol. On sent la tension du groupe, qui marche dans une sens, puis dans un autre. Les corps se frôlent sans jamais se toucher, les pieds se tordent sur le sol, les appuis sont un prétexte à toujours trouver un autre sens de course. Les corps tournent, vrillent, se détournent, s’attirent et se repoussent, dans une danse si épurée qu’elle en est fascinante. Dans la suite de pièces comme Elena’s Aria ou Cesena, Anne Teresa de Keersmaeker poursuit son travail d’exploration de la musique. Sa danse devient nécessaire pour une nouvelle lecture de ces œuvres musicales. Pure, sans fioriture, Anne Teresa de Keersmaeker touche de très près la perfection du geste, qui met tout le public en émoi. Vortex Temporum est sans doute l’une de ses plus belles créations.

Peter Pan, Bob Wilson & le Berliner ensemble

Le Festival d’Automne a mis Bob Wilson à l’honneur cette année. Du 12 au 20 décembre, on pouvait découvrir au Théâtre de la Ville Peter ou l’enfant qui ne voulait pas grandir d’après le texte de James Matthew Barrie, mis en scène par Bob Wilson, joué par l’excellent Berliner Ensemble, avec des musiques de Cocorosie. Retour sur la soirée démente du 17 décembre.

Décor ouvert dès l’entrée des spectateurs dans la salle. Un petit garçon est debout, une sorte de lanterne à la main. Au mur, son ombre. Le spectacle commence on débarrasse le décor et tous les personnages apparaissent. Famille Adams recomposée, on distingue mal les genre des personnages par leurs visages. Visages blancs, maquillés à la manière des vieux burlesques, Bob Wilson nous rappelle qu’un conte peut aussi effrayer les petits enfants. Ce portrait de famille inquiétant est immédiatement mis sur un autre plan quand les chants commencent. La fée est absolument délicieuse d’espièglerie et de malice et sa première chanson nous emmène déjà un petit peu au Pays de Nulle Part. On plonge dans le bleu de Bob Wilson qui caractérisent tous ses spectacles. Personnages en ombre, coupes de cheveux sorties d’un dessin animé, tout est fait pour nous plonger dans un monde imaginaire.

Peter Pan

Les musiques sont géniales ! On voudrait sortir du spectacle avec l’album intégral. Grinçantes, inquiétantes, drôles, entraînantes, je ne sais pas comment font les enfants pour rester sur leurs sièges mais moi, je me sens l’envie de me lever, de monter sur les nuages qui emmènent Wendy et ses frères, dans ce Pays de Nulle Part et d’aller taquiner le Capitaine Crochet. Bien sûr on sort avec l’air de « To die will be a great adventure ! », mais toutes les chansons sont mémorables. La musique rythmée de Lili la tigresse, ou la plus poétique du capitaine Crochet ne voulant pas perdre son seul ennemi/ami, ainsi que la chanson de Tinkerbell sont les must de la pièce.

Affiche Peter Pan

On soulignera une fois de plus la performance du Berliner Ensemble. Quels comédiens ! Ils signent tous un jeu d’acteur virtuose. Les personnages semblent taillés sur eux. Pas une fausse note, tous les déplacements sont très chorégraphiés, les tableaux s’enchaînent avec une grande fluidité. On suit facilement l’intrigue en allemand et en anglais. Les deux langues se complètent à merveille pour servir les émotions des personnages. Les comédiens passent avec une incroyable aisance d’une langue à l’autre.

Ce Peter Pan est un vrai coup de cœur de cette fin d’année. Un spectacle complet qui mêle magie, un texte magnifique (dont le livret complet était vendu 6€ !), des comédiens fabuleux et des chants formidables. On voudrait en reprendre une deuxième fois !  Bob Wilson est vraiment un génie de la mise en scène !

Partita 2 Sei Solo – A.T. de Keersmaeker / Boris Charmatz

Du 26 novembre 2013 au 1er décembre, le Théâtre de la ville présente Partita 2 d’Anne Teresa de Keersmaecker et Boris Charmatz. Reprise dans le cadre du Festival d’Automne, cette création a été présentée au printemps dernier à La Monnaie et cet été au Festival d’Avignon. Accompagnés sur scène de la violoniste Amandine Beyer, les deux danseurs livrent une danse dont la simplicité est l’élégance.

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La pièce commence dans le noir. Cela rappellera de mauvais souvenirs à certains et pourtant, c’est dans ce noir silencieux que commence la première suspension. La violoniste entre et joue dans le noir complet le début de la partition de Bach. Pendant dix minutes, nous voilà suspendus à la mélodie. On se laisser bercer pas ces notes enchanteresses ; on plonge dans une ambiance particulière, une communion sans pareille.

Puis, la lumière se rallume pour laisser place à la danse et au silence. Robe noir et baskets fluos, ADTK entre en compagnie de celui avec qui elle va danser pendant près d’une heure, avec une complicité sincère. Boris Charmatz, grand homme, en jeans, va montrer un style qui sied à celui que la chorégraphe belge avec lequel elle a écrit la pièce.

La scène est épurée ; le décor consiste en une lumière blanche, projetée telle une porte sur le mur de fond de scène. Au sol sont dessinés des cercles. Comme une rosace, ils se coupent et se croisent offrent ainsi aux danseurs un vrai parcours de jeu.

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La danse est pure. Une longue phrase chorégraphique, comme Anne Teresa De Keersmeaker aime les construire, va se déployer l’heure durant. Des marches sur les cercles. Des courses, qui sont interrompues par des suspensions. Le couple se fait tantôt miroir, tantôt dépendant l’un de l’autre. Ils se tournent autour tels des satellites. Le travail sur la marche est remarquable, répété tant de fois qu’il prend une force supplémentaire. La violoniste rentre en scène et, en haut des cercles, va les accompagner sur cette belle partition.

Si ce travail a commencé à partir d’improvisations, il semble qu’il n’en reste pas beaucoup de traces, tant la pièce est construite. Les appuis dans le sol, les suspensions, les marches, très fortes, cela marque le regard. Anne Teresa de Keersmaeker réussit une fois de plus son pari de dialogue avec la musique. Le couple forme un tout cohérent, les corps se complètent et construisent la pièce avec une grande élégance. Une pièce à voir, pour se laisser emmener dans la musique de Bach et admirer la qualité de la danse d’ATDK et Charmatz.

Nouvelles de 2013 n°17

L’été indien que nous offre le mois d’octobre n’est pas la seule raison de mes pages blanches sur ce blog, mais avouez tout de même que flâner au soleil au mois d’octobre après l’année que l’on a eue, c’est bien agréable.

Parmi les derniers spectacles que j’ai vus, pas de grand coup de cœur. Une soirée Trisha Brown en demi-teinte, avec deux premières pièces qui ne m’ont pas emballée, et une beaucoup plus forte que les autres, Newark, qu’on aimerait voir peut être dans un autre programme.

Gros coup cœur cinéma en revanche avec La Vie d’Adèle. J’ai adoré ce film, non il n’est pas trop long, oui c’est sublimement réalisé, oui c’est un grand film. Si vous avez déjà été amoureux, vécu une grande passion, vous y retrouverez forcément des émotions. Autre joli film, Haewoon et les hommes, film coréen qui raconte les épanchements amoureux d’une jeune étudiante. Un beau film, qui m’a fait penser aux films de Rohmer, notamment à Les amours d’Astrée et Céladon.

J’ai eu l’idée, peu originale certes, d’aller à la tour 13… 7 heures d’attente, là on frôle presque la folie, même pour Hopper, c’était moins dément.

  • Les sorties de la semaine

Trisha Brown, Trisha Brown, Trisha Brown… Comment, vous n’allez pas voir du Trisha Brown cette semaine ? Mes amis, il faut remédiez à tout ça et parfaire votre connaissance de la post modern dance américaine.

Trisha Brown est au Théâtre de la Ville dans le 2ème programme qui commence aujourd’hui et dans lequel on verra : Foray forêt – If you couldn’t see me – Astral convertible.  On peut trouver des places à la dernière minute. On n’hésite pas à flâner à la librairie et à admirer les très beaux clichés de Trisha Brown.
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Trisha Brown © Karli Cadel

Trisha Brown est aussi dans le programme mixte de l’Opéra Garnier. Elle est bien entourée, puisque Jiri Kylian et Saburo Teshigarawa sont de la partie. Doux mensonges sera repris, et Teshigarawa prépare une création avec Nicolas Le Riche, Jérémie Bélingard et Aurélie Dupont qui traitera de l’obscurité et de la lumière.
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Trisha Brown est aussi à l’honneur à la Cinémathèque. Dimanche 3 novembre à 11h30 sera diffusé un documentaire de Babette Mangolte, consacré à la chorégraphe avec des archives inédites.
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Si Trisha Brown ce n’est pas votre tasse de thé, l’alternative se trouve au Théâtre des Champs-Elysées. Le célèbre pianiste Lang Lang propose un spectacle avec le Houston Ballet, chorégraphié par l’australien Stanton Welch. Sur des balades, des valses et des nocturnes de Chopin, Lang Lang a conçu ce spectacle Sons de l’âme, car il adore la danse, qui peut être le mouvement physique de la musique. Les deux arts se montrent au public, de façon égale, en miroir. Un spectacle inédit qui promet de jolies choses.
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Lang Lang

Un petit mot de l’Opéra, il faut absolument aller voir Elektra, mise en scène de Robert Carsen, à l’Opéra de Paris. Même les balletomanes s’y retrouveront !

  • L’exposition de la semaine

Noureev s’affiche en invité permanent au CNCS. Quoi de mieux qu’un jour férié pour faire un petit week-end dans l’Auvergne et aller voir l’exposition qui est consacré au monstre sacré. Ezio Frigerio a signé la scénographie de l’exposition dans laquelle on retrouve bien entendu des costumes, qu’il a portés et d’autres de femmes, issus de ses ballets, des dessins, des affiches et aussi quelques objets personnels, comme son passeport ou des meubles.
Plus d’infos sur le site du CNCS, clic

La-collection-Noureev-entre-au-Centre-national-du-costume-de-scène

  • Le garçon de la semaine

Grégory Dominiak par Julien Benhamou

Grégory Dominiak

  • La vidéo de la semaine

Le concours interne de l’Opéra approche…. Alors comment les étoiles sont parvenues à passer les étapes. Retour sur le concours d’Isabelle Ciaravola 1999, où elle est devenue sujet.