étoiles

Nouvelles du 24 septembre

La semaine dernière fut chargée comme je les aime. Répétitions de la soirée Balanchine, une superbe pièce de théâtre à La Colline, reprise de la danse et des pilates, bref je n’ai pas chômé.

Lundi, reprise de la danse. Bizarre de remettre les pieds dans des pointes. Il faut dire que cet été, je n’ai pas enfilé un chausson. J’aime beaucoup les cours de reprise, on retrouve des sensations, on a l’impression que nos pieds n’ont pas utilisé leurs muscles depuis longtemps !
Mardi, direction Garnier pour la séance de travail de Balanchine. Là aussi, quel moment agréable d’être dans la salle de Garnier, voir un avant-goût de ce programme.
Mercredi, boulot, inscription aux pilates, un soupçon d’inspiration pour aller au cinéma et puis non. J’aurai bien été tentée par le film de Stéphane Brizé, Quelques heures de printemps. Je ne trouve pas la motivation de me lancer dans deux heures d’Alzheimer. En revanche j’entame Claustria, roman de Régis Jauffret
Jeudi, soirée au Théâtre de la Colline avec mon amie F*** pour voir Six personnages en quête d’auteur, de Pirandello, mise en scène de Braunschweig. J’ai trouvé la pièce formidable, la réécriture de Braunschweig intelligente, se glissant à merveille dans le texte d’origine, et la mise en scène fine et d’une certaine sobriété. J’ai vraiment beaucoup aimé la pièce, qui propose une réflexion sur la notion de personnages. Compte rendu à venir très probablement dans la semaine.
Vendredi, j’avais prévu de me reposer. Finalement je me suis retrouvée à la répétition générale de la soirée Balanchine pour mon plus grand plaisir. Premier défilé de la saison, un spectateur de ma loge n’a pas apprécié mon engouement. Sa mauvaise humeur ne m’a pas découragée, j’ai aperçu Youssef Bouchikhi un peu plus bas, cela tombait bien, nous devions faire un point théâtre. Il me recommande Antigone d’Anouilh au Vieux Colombier, je lui conseille de foncer voir le Pirandello. La distribution de la générale nous ravit, on tombe bien entendu d’accord sur l’aura de Nicolas Le Riche qui domine Agon dans le pas de deux avec Aurélie Dupont.
J’ai décidé de rester sage ce week-end et de me reposer pour entamer une semaine déjà trop chargée.

  • Les sorties de la semaine

Bien entendu, on fonce à Garnier découvrir la soirée Balanchine. Sérénade, Agon et Le Fils Prodigue tiendront la promesse d’une soirée réussie. Rappelons que les représentations de lundi et mercredi sont précédées du traditionnel défilé du ballet de l’Opéra. J’ai l’habitude de vous mettre les distributions, mais là elles sont presque uniques dans le sens où il y a des changements à chaque date. Pour les voir sur le site de l’opéra, c’est par ici. J’ai donc vu la première à la générale, la deuxième à la séance de travail. toutes me semblent assez intéressantes, selon les ballets. Je trouve que c’est un beau programme qui offre un bel échantillon du travail du chorégraphe américain.

Mon deuxième choix de la semaine va vers la pièce de théâtre qui va se jouer quatre jours au Théâtre de la Ville. La résistible ascension d’Arturo Ui de Bertolt Brecht raconte l’histoire d’un petit gangster minable qui rêve de conquérir Chicago. Le texte est une parodie d’Hitler, et montre avec drôlerie la dangerosité de ce type de personnage. J’avais découvert la pièce il y a dix ans et son écriture m’avait envoûtée. C’est avec joie que j’irai la voir mardi, avec la mise en scène fabuleus de l’immense Heiner Müller.

Plus d’infos et réservations sur le site du Théâtre de la Ville, clic.
Mercredi 26 septembre, une rencontre est organisée au théâtre avec  Jean Jourdheuil à propos d’Heiner Müller à 19h.

A lire : Article de promotion sur France Inter, clic.

Autres sorties, n’hésitez pas à aller voir La Nuit balinaise à Chaillot, ainsi que le spectacle gratuit qui a lieu devant Chaillot tous les jours à 18h, Solo 30×30 de Paul-André Fortier. Les Ballets Trockadéro de Monte-Carlo s’installent quant à eux aux Folies Bergères. A la MAC, Anne Nguyen, chorégraphe hip-hop, propose Promenade obligatoire, création dans laquelle elle construit ses contraintes avec la scénographie et notamment les lumières.

  • La presse de la semaine

Opéra de Paris

AFP, Ludmila Pagliero, naissance d’une étoile, clic.
Le Figaro Madame, Chicago dans les pas de Marie-Agnès Gillot, clic

Elephant Paname

Métro, Un nouveau lieu hybride dédié aux arts et à la danse, clic.
Le Figaro, Elephant Paname sur les pointes, clic.
Culture Box, Elephant Paname, nouveau espace d’art, clic.

A l’étranger

NYTimes, Ivan Vasiliev joins ABT, clic.
The Orange county register, Millepied aims to bring serious dance back to L.A, clic.

  • La vidéo de la semaine

 

Je ne l’ai pas vue ce week end, mais de ce que j’ai lu sur Twitter, elle a fait sensation au TCE. Petit bonus de Polina Semionova.

 

Rencontre avec Mathias Heymann et Isabelle Ciaravola


Après une belle après midi ensoleillée me voilà en route vers l’Opéra pour assister à une rencontre avec nos deux nouveaux étoilés, Isabelle Ciaravola et Mathias Heymann. rencontre qui a tout pour être prometteuse dans la mesure où, après avoir vu le film La Danse dans lequel les danseurs étaient plongés dans le silence je m’en vais à
Garnier où on va leur donner la parole. Cela m’a donc donné à réfléchir sur la parole du danseur. Après tout ces hommes et ces femmes ont choisi de s’exprimer avec leur corps, comment dès lors parler de cette expression? A mon sens le langage intelligible a la faiblesse de ses forces. Il est structuré, ordonné, souvent très réfléchi. lorsqu’il s’agit d’exprimer quelque chose de sensible, un sentiment par exemple ou une expression, il se retrouve confronté à des lacunes. Le manque de mots ou la répétition de phrases devient une difficulté. Je suis moi même confrontée à cela quand j’écris un papier sur un spectacle. Mes mots se répètent et reviennent. Je cherche longtemps je reformule plusieurs fois et pourtant les mots que j’utilise sont souvent les mêmes. Mes sentiments ne
sont jamais les mêmes si bien qu’une frustration persiste , celle de mal communiquer de ne pas parvenir à partager une émotion. Alors comment Mathias et Isabelle vont ils nous parler de la danse ce soir? Comment vont ils réussir à surmonter cette difficulté?
Impatiente dès lors je file prendre la ligne 8 (on se doit de prendre en amateur de l’Opéra de Paris  la même ligne que le titre du mensuel!) direction la rue Scribe.
La réception a lieu dans le salon Florence Gould. Dès l’entrée dans la salle je crois les trois protagonistes de la soirée que sont Isabelle Ciaravola, Mathias Heymann et Brigitte Lefèvre. Je m’installe le plus proche possible de l’estrade. Le salon est plein. Les jeunes danseurs de l’école de Nanterre sont présents, s’imaginant être à leur place dans quelques années.Brigitte Lefèvre nous présente ses deux nouveaux danseurs étoiles.
Pour faire au plus simple et ne pas me perdre dans des digressions je vais vous retranscrire l’entretien pendant lequel j’ai essayé de prendre des notes avec rigueur.

Brigitte Lefèvre : avant la nomination aviez vous dansé ensemble? ah oui dans La dame aux camélias. Qu’est ce que cela veut dire pour vous de danser ensemble?
Isabelle Ciaravola : C’était un moment unique, il y avait une véritable osmose entre nous. Sur scène nous étions en accord.
Mathias Heyman : Pour moi c’était une première. J’ai beaucoup appris grâce à Isabelle car elle m’a apporté toute son expérience.
Brigitte Lefèvre : Chaque danseur étoile a un parcours singulier. Pour Mathias il a été fulgurant et rapide. Pour Isabelle c’est un parcours différent, une fulgurance plus interne. Chaque danseur a une couleur particulière. Chacun a son rythme et fait son rythme mais ce qui est important c’est de vouloir être au sommet. C’est par cette volonté que l’on arrive à être étoile. C’est le cas d’Isabelle, sa force l’a menée là aujourd’hui.
Isabelle Ciaravola : C’est un cadeau d’interpréter des rôles d’étoiles. Il est très important d’être sur scène. le titre d’étoile est merveilleux mais ce qui compte ce sont les rôles d’étoiles qui permettent de progresser.
Brigitte Lefèvre : Quelles ont été les étapes qui ont été déterminantes pour toi Isabelle?
Isabelle Ciaravola : L’entrée au CNSM le premier prix du conservatoire, puis l’entrée à l’école de danse et enfin le soulagement l’entrée dans le corps de ballet.
Brigitte Lefèvre : Tu te souviens de ta génération?
Isabelle Ciaravola : Je suis rentrée première ex-aequo avec Marie Agnès Gillot. On était beaucoup à rentrer.
Brigitte Lefèvre : C’est une chose qu’il faut vraiment comprendre. L’amitié fait beaucoup avancer.  Quel était le rôle, un des premiers rôles qui t’as marqué dans le corps de ballet?
Isabelle Ciaravola : Le lac des cygnes car tout ces personnes ne font qu’un.
Brigitte Lefèvre : oui c’est un décor vivant qui porte l’étoile… […]
Isabelle Ciaravola :Je détestais les concours, la clochette et tout ce qui va avec…
Mathias Heymann : oui mais c’était une occasion de danser seul sur scène ce que tu ne peux pas faire dans le corps de ballet.
Isabelle Ciaravola : Il y a des danseurs qui adorent ça qui sont des bêtes de concours.
Brigitte Lefèvre : Mathias toi tu étais élève à l’école de danse.
Mathias Heyman : Oui j’ai fait deux ans de stage. Je suis entré en 2001 et j’ai eu le concours en 2004. Je me suis focalisé sur le travail.
Brigitte Lefèvre : Et les danseurs qui sont rentrés avec toi?
Mathias Heymann : J’ai crée des amitiés et des relations fortes à l’école de danse. Nous sommes toujours très proches. On avait une classe de première division incroyable avec un professeur qui nous a donné un super enseignement et une confiance en nous.
Brigitte Lefèvre : Et comment vis tu le fait de te retrouver étoile par rapport à tes camarades?
Mathias Heymann : Moi je le vis bien [rires]. Quand on devient premier danseur le rythme change. On est séparé du corps de ballet. Les répétitions sont séparées. J’ai la nostalgie car je les vois  moins. Mais nos liens sont forts. Il existe cependant une gêne du fait que je sois devenu étoile. Je ne suis pas différent.
Isabelle Ciaravola : moi il il y a moins de gêne mon parcours est plus long.
[…]
Brigitte Lefèvre : Isabelle on te voit toujours avec ton ipod qu’écoutes tu?
Isabelle Ciaravola : ça dépend de mon humeur…
Brigitte Lefèvre : vous avez été nommés sur le même spectacle (Onéguine NDLR). C’est un ballet très émotionnel, qui est indispensable au répertoire mais nous n’avions pas besoin de le prendre avant, peut être parce que nous n’avions pas les danseurs pour le danser. Le rôle masculin est tellement difficile. Comment vous êtes vous senti chacun dans vos rôles?
Isabelle Ciaravola : J’ai tissé mon rôle au fur et à mesure des répétitions.
Mathias Heymann : Le maître de ballet, M. Anderson, nous a beaucoup poussé et c’est par la technique qu’on est arrivé à l’émotion.
Isabelle Ciaravola : J’ai trouvé ce rôle naturel à interpréter. C’est bien écrit et j’ai bien vécu ce rôle.
Mathias Heymann : mon rôle est celui d’un jeune garçon. Je n’avais qu’à me laisser porter par l’histoire.
Brigitte Lefèvre : oui Mathias tu as aussi beaucoup de rigueur et d’auto discipline. Quelle a été votre impression quand vous avez été  nommés étoile?
Isabelle Ciaravola : Je n’étais pas au courant. J’étais concentrée sur le spectacle. C’était la première d’une entrée au répertoire. J’ai dansé. Quand vous êtes arrivés je ne vous ai pas
vus.
Mathias Heymann : on avait envie de bien faire. J’étais aussi très concentré sur le spectacle. J’étais heureux d’être sur scène. Quand je vous ai vue, je n’ai pas pensé que vous veniez pour moi.
Brigitte Lefèvre : La troisième symphonie de Gustav Mahler de Neumeier précédait Cranko. Cela peut il aider pour  appréhender Onéguine (NDLR Neumeier et Cranko viennent de la même école)?
Isabelle Ciaravola : C’était une chance de danser ces deux chorégraphes mais non c’était deux choses différentes. […]
Spectatrice : Le public attend les nominations. Comment faites vous pour ne pas perturber les danseurs? Comment garder un secret pareil. Moi même j’avais su qu’ils allaient être nommés et j’en avais mal au ventre.
Brigitte Lefèvre : la preuve que ce n’est pas un secret! Chaque nomination est faite en conscience. On voit l’évolution du travail. On a des remontées des chorégraphes, du public, des maîtres de ballet. Je propose des noms et c’est le directeur de l’Opéra qui décide. Le public est sensible très dans l’affectif. C’est une fête immense. Ce qui avait été dur c’était la nomination de Dorothée Gilbert (sans costumes sans décor, NDRL).
Spectatrice : Comment vivez vous la dualité langage du corps langage intelligible? Dans le film LA DANSE, on ne vous entend pas comme si vos corps étaient plongés dans le silence.
Mathias Heymann : Je suis un grand timide, je parviens mieux à m’exprimer avec mon corps. Cette dualité est en effet très difficile à gérer.
Spectatrice : beaucoup de danseuses disent que le moment le plus difficile à gérer dans Giselle est l’ouverture de la porte.  Qu’en pensez vous?
Isabelle Ciaravola : Je ne suis pas d’accord. Il y a bien d’autres moments difficiles dans Giselle.
Spectatrice : Qu’est ce qui a fait que vous avez voulu consacrer votre vie à la danse?
Mathias Heymann : Moi c’est la rencontre avec la scène qui a été décisive. J’ai sans cesse envie de revivre ce premier instant. C’est humainement incroyable!
Isabelle Ciaravola : moi j’ai baigné dans la musique classique. J’avais ça en moi. C’est une passion vers laquelle on a envie d’aller. L’amour de la scène est un échange incroyable.
Spectateur: en tournée vous êtes confrontés à de nouveaux publics. Vos sentiments sont ils différents selon les pays?
Isabelle Ciaravola : il y a des publics plus ou moins froids.
Mathias Heymann : il y a toujours beaucoup d’attente à l’étranger peut être plus qu’à Paris.

Je fais patiemment la queue pour saluer Mathias Heymann, retenu par
des spectatrices bien bavardes déjà lors de l’entretien. Ce jeune homme est délicieux. Il me salue en m’embrassant. Il est très timide mais chaleureux et ému par les compliments qu’on lui fait. Je renouvelle ici mes félicitations pour son travail, sa grâce et sa joie partagée sur scène. L’Opéra reçoit ses amis et sait le faire. Un petit buffet clôt la rencontre autour de discussions dansantes et chorégraphiques. Être un ami de l’Opéra est décidément un bonheur à chaque rencontre…

 

Vidéo de la nomination de Mathias Heyman et d’Isabelle Ciaravola lors de la première d’Onéguine de Cranko en 2009

 

Fiche de présentation Mathias Heyman

http://www.operadeparis.fr/cns11/live/onp/L_Opera/le_Ballet/le_Ballet_de_lOpera/Etoiles/Mathias_Heymann.php?&lang=fr

Fiche de présentation Isabelle Ciaravola

http://www.operadeparis.fr/cns11/live/onp/L_Opera/le_Ballet/le_Ballet_de_lOpera/Etoiles/Isabelle_Ciaravola.php?lang=fr

Fiche de présentation Brigitte Lefèvre

http://www.operadeparis.fr/cns11/live/onp/L_Opera/le_Ballet/Brigitte_Lefevre.php?lang=fr . On
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