Desh

Dernières nouvelles de 2012

Noël et ses repas gargantuesques ont eu raison de moi. Le petit rat a eu les yeux plus gros que le ventre et après des festivités familiales, c’est mon lit que j’ai rejoint avec fièvre et gastro (ce qui a le mérite d’éliminer une grande partie des excès!).

J’ai regardé mercredi la soirée spéciale danse sur France 2. Si vous ne ‘avez pas vue, je vais vous mettre les liens de rattrapage. On a commencé avec Fais danser la poussière, petit téléfilm bien familial et bien pensant, soulignant tout de même avec justesse, un racisme sévissant de façon forte en France dans les années 70-80 (et je sais de quoi je parle…). Il n’est pas disponible en replay, mais vous pourrez vous en passer.
Un jour, un destin, consacré à Rudolf Noureev avait le mérite de faire découvrir le personnage au grand public via un point de vue plutôt français. Assez peu d’images de danse au final, beaucoup d’interviews, de témoignages. Merci à Ariane Dollfus dont la biographie du génie russe a bien éclairé les réalisateurs. Allez hop, si vous ne l’avez pas lu, clic. Pour revoir l’émission, clic.

Je suis partagée sur le dernier documentaire, La danse à tout prix. Monté à la manière d’une real TV, avec des suspenses insoutenables, « Mais qui d’Héloïse, le cygne blanc, Pierre-Arthur, l’oiseau Phényx, François le jeune guerrier ou Léonore le cygne noir aura le concours… », la présentation était assez insupportable. Il avait ceci dit le mérite d’expliquer aux non-initiés le fonctionnement de l’institution, certes, de leur point de vue, on aurait dit que l’Opéra c’était la Star Académy…A 23h40, je ne suis pas sûre que beaucoup de non-initiés étaient devant leur poste. C’était en revanche très plaisant de voir les quatre artistes au travail, surtout lors des répétitions avec les conseils avisés d’Aurélie Dupont et Agnès Letestu. L’émission a réuni 300 000 téléspectateurs. Pour la revoir, clic.

Depuis mon lit, j’ai aussi regardé La danse au travail, coffret DVD assez passionnant, clic. Regarder Guillem danser Forsythe, en répétition, puis en scène… on ne s’en lasse pas. Puis regarder Forsythe travailler aux répétitions d’Impressing The Czar… Je vous conseille vivement ce coffret que je n’ai pas fini d’explorer.

Samedi j’ai retrouvé des forces pour aller au Théâtre de la ville voir Desh d’Akram Khan et je n’ai pas été déçue du déplacement. J’ai passé une soirée remplie de poésie et d’émotions. Si vous en avez l’occasion ne manquez pas ce voyage artistique. Pour relire ma chronique, clic.

  • Les sorties de la semaine

La sortie de la Saint-Sylvestre pour moi se passera à Garnier pour revoir la soirée Forsythe/Brown.

Vincent Chaillet In The Midlle Somewhat was elevated William Forstyhe photo de Julien Benhamou

Cette semaine, le ballet de l’Opéra de Paris se repose avant de partir en tournée vers un pays grand et chaud danser Giselle. La compagnie d’Angelin Preljocaj investit les lieux pour quelques jours avec deux pièces, Helikopter et Eldorado. A voir du 5 au 10 janvier 2013.

Plus d’infos et réservations, clic.

  • En vrac

Le festival 1,2,3 Opéra ! donnera sa première édition du 15 au 26 juin et est consacré aux classes du programme Dix mois d’école et d’Opéra. Les classes pourront ainsi présenter leur travail. Pour l’occasion Sébastien Berthaud va chorégraphier une pièces pour 24 enfants de 6ème. J’espère qu’il y prendra beaucoup de plaisir, pour en avoir l’expérience, les enfants sont un matériau et une inspiration d’une richesse rare. Leur ouverture d’esprit est fascinante.

On parle de Don Quichotte dans le Figaro Madame et dans Danse Magazine.

Le NYTimes a vu la soirée Forsythe, voici ce que Roslyn Sulcas en a pensé, clic.

Réécouter Ludmila Pagliero dans le Grand entretien de France Culture , clic.

A lire dans les kiosques, Causette et son article sur Anna Halprin.

Ne manquez pas le 4 janvier, Don Quichotte est rediffusé sur ARTE dans la distribution Dorothée Gilbert Karl Paquette.

Le Bolchoï serait de retour à Paris en 2014 avec un programme Ratmansky.

Revoir la Traviata sur ARTE Live web, clic.

Blanca Li entre au Petit Larousse.

A voir sur Dansermag, un petit reportage vidéo sur Akram Khan, clic.

Revoir le ballet Igor Moïsseiev, clic.

  • La vidéo de la semaine : Allister Madin, chef gitan

Bravo à Allister Madin qui a assuré quinze représentations du Chef gitan avec toujours autant de panache (et de virilité…). Olé !

  • Bonus : mon top 10 de 2012 !

Mon top 10 danse a été facile à faire, je n’ai presque pas eu besoin de réfléchir.

1) Sharon Fridman, découvert cet été au Théâtre de l’Athénée lors du Festival Paris Quartier d’été avec A****. Revu cet hiver au Silencio. Sa danse est fascinante, envoûtante, ensorcelante. Relire ma chronique, clic.
2) May B de Maguy Marin, pas besoin de mots, chef d’œuvre absolu, soirée inoubliable. Relire ma chronique, clic.
3) Desh d’Akram Khan. Oui c’est très récent, mais quand même ! C’était très fort, et peu de pièces cette année m’ont donné autant d’émotions ! Relire ma chronique, clic.
4) Orphée et Eurydice de Pina Bausch, parce qu’on ne peut se lasser de la danse de Pina, parce que l’Opéra de Paris a dansé ce chef d’œuvre avec une grandeur d’âme rare et sincérité. Relire ma chronique, clic.
5) Revelation d’Alvin Ailey. J’ai passé une soirée géniale, j’ai vu le public en folie et j’adore ce ballet, plein de vie ! Je ne l’ai malheureusement pas chroniqué, cela doit traîner dans un de mes carnets.
6) Apartement de Mats Ek, belle reprise de cette pièce drôle, émouvante. Je ne mets que cette pièce, car le Robbins qui l’accompagnait m’a plutôt ennuyée. Relire ma chronique, clic.
7) Les adieux de Clairemarie Osta dans l’Histoire de Manon. Moment très émouvant après une jolie série de ce ballet. Relire ma chronique, clic.
8) Roméo et Juliette de Sasha Waltz avec Mélanie Hurel et Vincent Chaillet. Très jolie prise de rôle dans ce ballet à la scénographie superbe. Les deux jeunes interprètes ont su utiliser le langage de la chorégraphe allemande. Relire ma chronique, clic.
9) Cesena d’ATDK. Cette pièce qui a fait beaucoup de bruit, m’a émerveillée. Le travail de cette chorégraphe me fascine, car c’est une vraie expérience auditive et visuelle qu’elle a fait vivre aux spectateurs. Relire ma chronique, clic.
10) Bayadère avec Zakharova. La déesse russe m’a happée. J’ai adoré cette soirée, j’en garde un souvenir très joyeux. Relire ma chronique, clic.

ERRATUM : J’ai oublié dans mon top 10, une pièce que j’ai adoré, bien évidemment, 1980 de Pina Bausch ! Voilà mon Top 10 est un TOP 11 je ne serai jamais cartésienne ! Relire ma chronique, clic.

Mon top 5 autres spectacles :

1) L’irrésistible ascension d’Arturo Ui, parce Martin Wuttke est un acteur extraordinaire et la mise en scène d’Heiner Müller est d’une intelligence rare. Relire ma chronique, clic.
2) Medea de Sasha Waltz et Pascal Dusapin. La danse de Waltz, la musique, la mise en scène forte et lisible. Sublime. Relire ma chronique, clic.
3) Nouveau roman de Christophe Honoré au Théâtre de la Colline. Drôle, intelligent, très bien mis en scène, belle écriture. A voir sans modération. Relire ma chronique, clic.
4) La Traviata d‘Andrea Breth, pour sa mise en scène superbe et provocatrice. Relire ma chronique, clic.
5) Le gros, la vache et la mainate de Bernard Menes, parce que je n’avais jamais autant ri devant une pièce de théâtre.

Mon flop 5 de l’année 2012 :

1) Napoli par le Ballet du Danemark. Relire ma chronique, clic.
2) Kabuki par le ballet de Tokyo. Relire ma chronique, clic.
3) La saison 2011 2012 du Théâtre de la colline, que des purges… Si bien que même les bons spectacles, on ne s’en rappelle plus…
4) La petite, seule erreur de ce début de saison au Théâtre de la Colline
5) Ballet am Rhein, trop de prétention tue la danse. Relire ma chronique, clic.

A noter dans les autres moments remarquables de cette année 2012 :
les trois nominations d’étoiles à l’Opéra de Paris (j’ai assisté à 2!!) , bravo donc à Ludmila qui a depuis explosé tout en Kitri, Josua Hoffalt et Myriam Ould-Braham, qui a fait un beau début de saisons dans la soirée Balanchine.
L’ouverture d’Elephant Paname, lieu assez magique. On attend avec impatience l’exposition de février qui sera consacrée à Noëlla Pontois.
Ma visite aux Ateliers Berthier, lieu fantastique où l’on découvre l’envers du décor. Pour revoir mes photos, clic et ma chronique, clic.
Le NDT au cinéma en attendant leur venue la saison prochaine à Paris ! Relire mes chroniques, clic et clic.

Très bon réveillon à tous ! Rendez-vous l’année prochaine !

Desh, autoportrait d’Akram Khan

Desh m’a bouleversé, m’a fait beaucoup pleurer, m’a emmené ailleurs. Desh raconte un homme, une histoire, une filiation. Desh raconte comment un homme construit son identité, à travers sa double culture, son parcours artistique.

Desh Akram Khan

Desh est construit comme un conte. Cela commence par un homme qui apparaît dans la pénombre. Il marche, lanterne à la main, et arrive près d’un petit monticule de terre, avec un reste de buisson, décharné. Il saisit un maillet et frappe ce monticule de terre, avec ardeur et presque rage par moment. Un rythme résonne, comme un cœur qui bat, cela s’accélère puis s’arrête. La danse commence sur des bruits de rue. Le danseur évolue dans cette rue, si différente des rues de Londres, sa ville natale. Il se faufile, tel un chat, à travers ces rues, entre les voitures, les mendiants, les marchands ambulants. Les gestes sont rapides, le corps se balance de part et d’autre de la scène. Le regard est lui aussi rapide, il guette, essaye d’attraper le plus d’images. Avec lui, le spectateur se place dans cet univers. Les images imaginaires se superposent et c’est là, la vraie force du spectacle. Chacun peut y mettre son passé, ses souvenirs de voyage, de rencontres, réelles ou dans les livres.

Akram Khan Desh

Akram Khan construit à travers cette pièce un dialogue avec son père. Il dessine sur son crâne un visage. La morphologie change, le ton de la voix aussi. Un petit homme nous raconte sa vie au Bangladesh. Sa vie de cuisiner, humble, digne, une vie ritualisée, où il n’y a pas de place pour la rêverie, les loisirs. Dès lors, ce crane où le maquillage disparait peu à peu incarne le visage de son père. Il va dialoguer avec lui, être en conflit avec lui. Conflit sur l’accent du jeune homme, plus proche de la communauté noire londonienne ; conflit sur la danse, lui qui a commencé par apprendre le khatak à 7 ans et qui préfère danser sur Mickael Jackson.

Akram Khan Desh

Si le conflit de génération se fait sentir, ce n’est pas qu’à travers la culture. L’intelligence du danseur chorégraphe fait de cette question quelque chose d’universel. Décalage entre la culture de la terre et le monde dans lequel évolue le danseur, qui n’a de cesse de téléphoner à une plateforme d’aide pour son iphone qui ne fonctionne pas.

Petit à petit, face à un problème de transmission, Akram Khan se replonge dans les contes de son enfance. Avec une scénographie somptueuse, faite de dessins projetés sur un voile, le poète danse un conte où l’on croise de multiples animaux. Il danse au milieu des arbres et des abeilles, comme il dansait au milieu des voitures et des charrettes de la rue. Toujours avec cette grave féline, on voyage dans cette histoire qui s’interrompt par la pluie.

Akram Khan évoque tous les problèmes des origines. Doit-on être responsable du passé de ses parents, de son pays ? Comment vivre et voyager en se sentant étranger partout ? La danse semble être une réponse à cette quête. Aux multiples facettes, elle dessine l’intérieur de l’âme du danseur, qui se livre avec une grande humilité, et une belle sincérité. On ne peut qu’être touché par ce dialogue entre lui et lui-même, mais qui ne laisse jamais le spectateur de côté. Il utilise son corps comme un medium universel, pour raconter, enchanter, faire voyager. Il décortique son histoire à travers le mouvement, pour comprendre, accepter ce métissage, cette double culture. Il enfile à la fin un vêtement bengali, remet la terre sur le monticule, coupe son téléphone portable. Bouleversant.

Akram Khan Desh

Page officielle du Théâtre de la Ville, clic.

A lire ailleurs :

The Telegraph, clic.
The Guardian, clic.
La Croix, Akram Khan danse un envoutant retour aux sources, clic.
Le Monde, En un solo magique, Akram Khan remonte le fil originel de sa danse, clic.
France inter, JT, à 10’08, clic.