Winterbranch

Nouvelles de 2013 n°13

Les deux dernières semaines furent chargées et pleines de bonnes surprises. Pour une fois je fais le bilan à l’envers. Ce week-end, entre deux répétitions de théâtre (j’aime la scène sous toutes ses formes…), j’ai filé à la Colline pour découvrir une pièce d’une très bonne qualité. Dénommé Gosdopin est une fable moderne qui raconte comment un homme qui heureux d’être dépossédé de tout se retrouve avec une demi million d’euro. Il essaye de s’en débarrasser, en vain. Pleine d’humour, la pièce traite de la manière de vivre dans nos sociétés occidentales. Est-il possible de vivre autrement, en faisant fi du libéralisme ? La pièce fait rire, le personnage de Gosdopin est très émouvant, avec une vérité qui résonne qui trouve un écho forcément différent chez chaque spectateur. A voir, d’autant que c’est Benoit Lambert qui a aussi mis en scène l’excellent Que faire ? bientôt à la Colline.

Vendredi soir, j’ai découvert la compagnie de Benjamin Millepied le L.A. Dance Project. Après quarante minutes de profond ennui devant Reflections, une pièce de Benjamin Millepied, qui m’a semblée plutôt fade, je me suis régalée devant Winterbranch de Merce Cunningham. Si la pièce a été huée, je suis restée complètement dedans, tant la chorégraphie était fascinante. La troupe de Millepied est très belle, les danseurs sont vraiment excellents. Enfin pour finir, ce petit bijou de Forsythe, Quintett, dont on sort avec un large sourire tant cette pièce est émouvante et pleine de poésies et de subtilités.

Jeudi soir, Drumming d’Anne Teresa de Keersmaecker tranchait complètement avec le programme de la semaine précédente, Elena’s Aria. Sur la musique de Steeve Reich, le rythme des percussions emmenait une danse fluide. j’ai passé une bonne soirée même si j’avais la chorégraphie de Rain qui me revenait toujours en tête. Moins puissant que Rain, Drumming a tout de même convaincu le public et moi avec , car il se passe tout de même toujours quelque chose dans les pièces d’ATDK.

Mardi soir, j’ai vu Le Cirque invisible au Théâtre du Rond Point. Si le spectacle est remplie d’une belle humanité et de beaucoup de poésie, je m’y suis parfois ennuyée. Les numéros de magie de Jean-Baptiste Thierrée ne sont pas tous réussis. Victoria Chaplin est toujours aussi surprenante et époustouflante, sa tonicité et sa souplesse sont vraiment incroyables.

  • Les sorties de la semaine

L’évènement à ne pas manquer de la semaine, c’est le Sacre du printemps au Théâtre des Champs-Elysées. La soirée sera retransmise mercredi soir en direct sur ARTE Live web. La soirée sera composée de la reprise du Sacre d’après Nijinsky, puis une nouvelle version signée Sasha Waltz.

Sacre TCE
A lire une lettre de Tamara Nijinski, à propos des droits d’auteur de la pièce originelle, clic.
Cette première série de « Sacre » sera suivie la semaine prochaine de la venue du Tanztheater Wuppertal qui viendra bien sûr danser le Sacre de Pina. Puis, ce sera au tour d’Akram Kahn, de venir proposer sa vision de cette œuvre. Plus d’infos et réservations, clic.
A noter aussi, que deux grandes journées de rencontres sont organisées autour de ce grand évènement les 30 & 31 mai. Plus d’infos, détails, et réservations, clic

Si le Sacre ce n’est pas votre truc, rendez-vous au Palais des Congrès pour voir le Gala Noureev & Friends les 31 mai et 1er juin. Au programme de très grands artistes invités, Tamara Rojo, Aurélie Dupont, Evgenia Obratzova, Mathias Heymann et bien d’autres. Tout le programme détaillé est .
Réservations, clic

  • Le cinéma de la semaine

Pour la dernière fois de la saison, jeudi 30 mai à 20h, Pathé du très brillant Neaderlands Tanz Theater. Au programme, de très belles choses :

MAYBE TWO | ALEXANDER EKMAN – Nouvelle création
SARA | SHARON EYAL & GAI BEHAR – Nouvelle création
STUDIO 2 | SOL LEÓN & PAUL LIGHTFOOT
DREAM PLAY | JOHAN INGER

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Deux créations et deux pièces « hommage », une aux 50 ans du ballet NDT et l’autre, qui est une sorte d’hommage au Sacre du Printemps.
Voir un extrait vidéo, clic.

  • La photo de la semaine

Eve par Julien

  • La vidéo de la semaine

L.A. Dance Project de Benjamin Millepied

De passage pour quelques jours à la capitale, Benjamin Millepied a eu l’occasion de montrer sa jeune compagnie, ses créations ainsi que ses choix de répertoire. L’occasion pour le public de fantasmer sur son travail futur à l’Opéra de Paris. Ne faisons pas un bond en avant dans le temps et revenons sur la soirée du 24 mai.

La soirée s’ouvrait avec Reflections une pièce de Benjamin Millepied pour 5 danseurs. Si les quinze premières minutes ne sont pas désagréables, on tombe assez rapidement dans l’ennui. Certes, on sent bien les formes et les matières que le chorégraphe a voulu explorer. De là à le faire pendant 40 minutes, on en a perdu de l’émotion en route. Il nous perd dans des courses qui n’en finissent pas. Quand le panneau GO apparaît, (mais pourquoi cette scénographie ????) on aurait presque envie d’obéir et de quitter la salle. On se rappelle alors qu’après il y a un Cunningham et le merveilleux Quintett de Forsythe, qu’on ne manquerait sous aucun prétexte. On se met donc, nous aussi spectateur à explorer et décortiquer les intentions, les effets, à défaut que cela ne provoque un quelconque effet en nous. La pièce permet d’observer les cinq danseurs, très beaux, à la technique assez remarquable.

 

Reflections (c) Marie-Noëlle Robert

 

D’autres spectateurs ont sans doute eu le même besoin que moi de quitter la salle pendant le Cunningham. Je reconnais qu’au delà du 10 rang, on ne devait pas distinguer grand chose de cette pièce qui n’est éclairée que par des phares de voitures et quelques lampes torches de mauvaise qualité. Rajoutez à cela des bruits urbains en guise de musique, certains spectateurs s’agitaient drôlement sur leurs fauteuils. Pourtant, la chorégraphie de la pièce est absolument captivante et si on ne la lâche pas, elle devient obsédante, comme souvent chez Cunningham. La danse fait sens presque à elle seule, dans un enchaînement de pas très dessinés dans un espace qui brouille le regard du spectateur. Les traits noirs dessinés dans l’espace par les corps deviennent lumineux. Ils chutent au sol de façon successive, se relèvent à chaque fois d’une façon qui semble différent. Le tout crée une mélodie chorégraphique très mélodieuse en opposition à la musique si cacophonique.

winterbranch (c) Ryan Schude

Le bijou de la soirée reste Quintett remarquablement exécuté par les cinq danseurs de la compagnie. La pièce est une succession de solos, duos, trios sur la très obsedante musique de Gavin Bryars. La délicatesse des portés, les pas à la fois virtuoses dans leur exécution et si dans leur intention, tout concorde à mener le public vers l’attendrissement et l’émotion. Si la pièce a été créée suite à un décès, elle évoque de multiples sentiments ; la peur, le doute, la fragilité humaine mais aussi l’espoir. On ne ressent jamais la fatalité car tout est calme il n’y a rien de précipité. Les interprètes affichent toujours un sourire serein.

Quintett (c) Marie-Noële Robert

Une belle compagnie, des choix de pièces pertinents, Benjamin Millepied pose le décor pour sa future venue à la tête de l’Opéra de Paris. Espérons que le public lui laisse du temps pour mettre en place des choses intéressantes comme celles qu’on a vues ce soir.

Représentation du vendredi 24 mai 2013, avec Charlie Hodges, Nathan B. Makolandra, Rachelle Rafailedes, Julia Eichten, Morgan Lugo.