Svetlana Zakharova

Gala des étoiles, Svetlana Zakharova, Palais des Congrès

Cette première édition rassemblait un grand nombre de soliste, la plupart inconnus du grand public français, venant parfois aussi de ballet assez inconnus. Pour attirer le badaud, les organisateurs ont eu la douce idée d’inviter Svetlana Zakharova et heureusement pour la soirée.

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On retrouvait bien entendu les grands classiques des gala. Le pas de deux du Lac des cygnes m’a laissée dans un certain état de désolation. Le couple n’était pas musical, la jeune Sofia Goumerova était très raide, dansant les épaules en l’air tout le long. Les jambes étaient jetées et les bras s’agitaient comme ceux d’un oiseau en cage. Dans Flammes de Paris, on découvre un jeune Kazak, Nolan Konokbaev, impressionnant par son dynamisme et son amplitude, mais qui a parfois oublié ce que le mot « danse » veut dire. Le côté cirque de ses prestations durant la soirée ne m’ont pas vraiment convaincue. On assiste à un Roméo et Juliette, chorégraphié par Nikita Dolgasin, qui n’est pas très convaincant ni par ses interprètes, ni par sa chorégraphie. Au milieu de cette première partie, une petit étincelle naît, c’est lors du pas de deux du Corsaire où l’on peut admirer le jeune Viktor Lebedev, absolument admirable de légèreté et de finesse. La petite parenthèse 1+1+1 est un moment sympathique mais dont on ne garde pas grand chose au final. Zakharova arrive, danse La mort du cygne, elle vous fait frissonner par le mouvement, même minime de ses bras, remplis d’eau, si beaux. En moins d’une seconde, on oublie tout le reste, et on reste silencieux, devant la grâce du cygne.

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En deuxième partie, le pas de deux de Casse-Noisette est très honorable, avec toujours Viktor Lebedev, élégant et princier, accompagné par Maria Semenyachenko. Leur duo s’accorde bien , c’est très bien mené. Bizarrement, je crois que je préfère la variation de Noureev pour la fée dragée, à celle de Petipa, ou encore celle de Balanchine. Cela s’ouvre donc bien, surtout qu’on continue avec la création de Vladimir Varnava, Plus minus zero, pour lui et Svetlana Zakharova. Cette courte création, montre tous les talents de la diva classique en contemporain. Elle me fait penser à Sylvie Guillem par ses capacité physiques et artistiques étonnantes. Sur la musique d’Arvö Part, les deux danseurs évoluent dans un langage qui ressemble beaucoup à celui de Mats Ek. C’est à la fois doux et plein de tensions. Cela donne envie de voir Zakharova dans autre chose que Bayadère, car c’est vraiment une artiste incroyable.

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Le Chasseur est un pas de cirque impressionnant, un peu kitch mais ma foi pas désagréable. C’est une sorte de réplique de Flammes de Paris, version slip léopard et gourdin. Le pas de quatre ressemble comme deux gouttes d’eau à la variation des femmes de la première partie. Dansé par quatre danseuses de la Compagnie Gjiel, on frôle le ridicule chorégraphique par des mouvements de bras et de poignets qui ondulent ça et là, sans véritable sens. Ça dégouline. C’était assez long à regarder. C’est pénible.
Deux pièces se suivent et ne se ressemblent pas. Con Tutti se veut comique, mais on commence franchement à fatiguer, puis Le Bal Fantôme dont il ne me reste aucune image en tête. On finit par un traditionnel Don Quichotte, pas mémorable, dont la variation de Kitri est dansé laborieusement sans l’éventail par Khaterina Kanunkova.

Une soirée, vous l’aurez compris, qui ne me laissera pas des souvenirs mémorables, mais qui aura eu le mérite de voir Zakharova à Paris, et juste pour cela, cela valait le déplacement !

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Nouvelles de 2013 n°2

La semaine dernière fut agitée. Le monde de la danse a été bouleversé par un attentat terrible contre le directeur artistique du Bolchoï Sergeï Filin. Jeudi soir, tard, un homme masqué a aspergé le visage du danseur d’acide. Son visage est brûlé et il y a un grand risque qu’il perde la vue. L’homme avait déjà reçu des menaces car sa gestion et ses choix artistiques ne plaisent pas à tout le monde. Alexei Ratmansky, qui a eu le même poste par le passé, a témoigné que l’ambiance dans le théâtre n’était pas toujours bonne. De nombreux danseurs ont témoigné de leur soutien, dont Svetlana Zakharova. Brigitte Lefèvre a aussi donné son soutien, à titre personnel et de tout l’Opéra de Paris. Plus d’infos sur le sujet, dans Le Huffington Post, Le Guardian, Euronews, Le New-York Times et Le Monde.

Je n’ai pas vu beaucoup de danse ces derniers jours. Je suis allée au théâtre voir des bonnes choses, comme Tristesse animal noir, au théâtre de la Colline. La pièce d’Anja Hilling, mise en scène par Stanislas Nordey, traite de la catastrophe. Comment vivre quand on a vécu un tel traumatisme ? Que faire de sa culpabilité quand on est responsable ? Le texte est dur, mais criant de vérité. Les comédiens sont vraiment excellents, et moi qui ne suis pas toujours enthousiaste du style Nordey, j’ai été plutôt conquise cette fois là. Ma chronique à relire, clic. La purge que je me suis tapée était Nouvelle comédie fluviale qui se joue en ce moment au Théâtre du Rond-Point. Humour gras, blagues à tiroirs, décor en carton pâte, sketch qui font des flops, j’ai trouvé la pièce très ringarde, et j’ai vraiment souffert devant tant de niaiseries… Heureusement, ma joie est revenue quand je suis allée voir Fin de partie à l’Odéon. Chef d’œuvre littéraire, la pièce de Beckett est jouée avec brio et intelligence. Cela fait du bien de voir ces grands textes, mis en scène avec tant de justesse. Relire ma chronique, clic.

Décor de fin de partie, en ce moment à l'Odéon, photo d'Agathe Poupeney

J’ai aussi assisté à la rencontre AROP avec Ludmila Pagliero et Josua Hoffalt, dont je vous ferai un petit compte rendu dans la semaine.

Pas vu grand chose au cinéma, si ce n’est Tabou, film de Miguel Gomes, qui raconte en noir et blanc et sur un discours narratif la vie d’une femme, qui a eu une grande histoire d’amour cachée, lors de sa vie en Afrique. Le film ne m’a pas emballée alors que les critiques sont dithyrambiques. Je suis restée un peu à côté du film, pas assez touchée sans doute par cette histoire d’amour, qui arrive après une première partie, qui se passe à Lisbonne et qui est bien longue. Voir la bande annonce, clic. J’ai hâte d’aller voir le dernier Tarentino.

Ce week-end j’ai été enchantée par la neige, j’ai longtemps marché dans Paris, Garnier étant à deux pas de chez moi, je me suis laissée aller à faire ma touriste.

Garnier sous la neige @lepetitrat sous Instagram

  • Les sorties de la semaine

A Chaillot, il faut foncer voir Don Quichotte du Trocadéro. Presse, bloggeurs et spectateurs sont très enthousiastes devant ce spectacle plein de vie, drôle et bien chorégraphié.
Plus d’infos et réservations, clic.
A lire :
Le blog de la blonde, clic
Culturebox, José Montalvo invente Don Quichotte, clic
Le Figaro, Don Quichotte revient dans la danse, clic
Les Balletonautes, clic

Au Théâtre de la Ville, la compagnie Ultima Vez vient avec Œdipus/bêt noir, chorégraphié par Wim Vandekeybus. Cette chorégraphie reprend le mythe d’Oedipe par le biais du livre de Jan Decorte. Dans un atmosphère très sombre, 16 danseurs et comédiens racontent le mythe grec. Voir un extrait vidéo, clic.
Plus d’infos et réservations, clic

Côté théâtre, vous l’aurez compris, je vous conseille fortement Fin de Partie, à l’Odéon, mis en scène par Alain Françon. Joël Pommerat propose une pièce aux ateliers Berthier, La réunification des deux Corées, qui m’a déjà mis l’eau à la bouche, le rendez-vous est pris.

  • La beauté de la semaine : Mathilde, again ! Par Julien Benhamou.

Mathilde Froustey par Julien Benhamou

  • En vrac

La collection Ballet Rosa dessinée par Isabelle Ciaravola est disponible chez Cas danse ! Personnellement, je vais aller y faire un tour dès la semaine prochaine, ce petit justaucorps grenat en velours et dentelle me fait bien envie.

L’exposition Noëlla Pontois débutera le 1er février à Elephant Paname. La danseuse étoile fera une séance de dédicace les 2 et 14février ainsi que  les 2, 21 et 24 mars. On sait déjà que sa loge sera reproduite à l’identique avec des objets personnels.

L’Opéra de Paris est encore montré du doigt pour « harcèlement moral ». Cette fois ci, le dossier concerne les hôtes de caisse de l’Opéra Bastille. Décryptage par L’Express, clic.

Revoir Tam Taï de Karine Saporta sur ARTE Live Web, spectacle du festival Suresnes Cité Danse, clic.

Blanca Li devrait réitérer sa fête de la danse au Grand Palais en septembre.

Agathe Poupeney expose ses photographies du 19 janvier au 2 février à Viry-Châtillon dans le cadre du festival de danse Les envolées. Plus d’infos, clic.

A lire, un portait d’Aurélie Dupont qui dansera Giselle lors de la tournée en Australie, clic.

Sharon Fridman a un nouveau site internet, clic

  • La vidéo de la semaine

Maria Alexandrova et Sergei Filin dans la Fille du Pharaon.

La diva Zakharova

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Soirée Magique à Bastille ! Sevtlana Zakharova n’est pas une danseuse, c’est une diva qui dégage quelque chose de si puissant que les frissons sont permanents. Placée au 13ème rang d’orchestre, pile au centre, je n’ai jamais eu une telle vue pour voir l’entrée de Nikiya. Dès son arrivée quelque chose se passe dans la salle. Un silence religieux, tout le monde retient son souffle, jusqu’à ce que le grand Brahmane lui retire le voile qui cache son visage. Le mystère dévoilée, c’est parti pour trois actes de bonheur.

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Zakharova se montre tout de suite d’une justesse étonnante. Sa bayadère est à l’image de sa danse. Fine, belle sans faux pas et au service de l’émotion. Les scènes de pantomime sont admirablement jouées. Son refus du Brahmane est clair et net, elle ne veut pas de cet homme car Solor occupe déjà tout son corps et son coeur. Sa danse change de façon radicale. Retenue et sobre devant le Brahmane, explosive avec Solor. On voit cela aussi clairement quand le fakir lui annonce le rendez-vous secret, un large sourire se pose alors sur son visage.

Le premier pas de deux est superbe. Stéphane Bullion libère sa danse pour camper un Solor transi d’amour pour cette Nikiya si particulière. Ce qui m’impressionne chez Zakharova, c’est la lisibilité de sa danse et de son jeu. Chaque geste est clair, chaque regard veut dire quelque chose. On retrouve ce dont parlait Laurent Hilaire l’autre soir en rendez vous Arop.

La danse des fakirs est un moment qui me plaît toujours autant, menée par Allister Madin à l’énergie inépuisable.

La scène 2 de l’acte I voit l’apparition de Gamzatti sous les traits de Ludmila Pagliero. Digression. En parlant de traits, pourrait-on charger un peintre de faire les portraits
des danseurs dans le tableau de Solor ? Josua Hoffalt a eu la chance d’avoir le sien, il serait bien que chaque danseur ait son visage, Laurent Hilaire trônant encore sur le tableau. Parenthèse fermée, je reviens à Ludmila Pagliero. Elle campe une Gamzatti très nerveuse. On le voit bien lors de la confrontation qui est très réussie. Si elle se réjouit de découvrir son fiancé, c’est l’amertume qui gagne son âme quand elle comprend qu’il lui a menti. Elle déploie dans sa danse une belle énergie. A l’acte II, elle montre une technique impeccable qui renforce le caractère du personnage qu’elle donne à voir. Le partenariat avec Bullion se passe très bien. Gamzatti est une jeune femme inquiète de voir le regard de Solor se poser sur Nikiya.

Emmanuel Thibault en idole dorée est complètement réifié. J’ai encore du mal avec ce style un peu trop froid pour moi, et je crois que j’ai trop en tête la proposition de Mathias
Heymann qui m’avait réjouie il y a deux ans.

La danse indienne vient réchauffer les esprits, Kora Dayanova et Cyril Mitilian donnant la pêche au groupe.

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La variation de Nikiya au deuxième acte est un pur moment d’émotion. Chaque regard est puissant. Son dos se courbe sous la douleur de la trahison. C’est très suspendu, très
aérien. Chaque pas est finement pensé. Les jeux de regards entre Solor, Gamzatti et Nikiya fonctionnent bien. Il y a de l’électricité dans l’air. La scène de la mort est superbe. Le regard de Nikiya m’a glacée le sang avant sa chute au sol.

IIIème acte, encore un beau moment. La descente des ombres est toujours aussi envoûtante. J’ai fait très attention à la respiration des danseuses, l’attention qu’elles ont les unes sur les autres, c’est vraiment un travail épatant. Bravo à Sabrina Mallem qui a mené toute la troupe sans vaciller. Les trois ombres sont un instant de lumière. Je suis sous le charme de Charline Giezendanner qui apporte beaucoup de pétillant à la variation. Il y a d’ailleurs beaucoup de joie à ce troisième acte si on le compare à d’autres actes blancs. Les bravos pleuvent et le public est très enthousiaste.

Zakharova et Bullion dansent un pas de deux magique. La diagonale de déboulés et piquées de la russe est euphorisante. Je sors envoûtée de cette représentation. Un grand bravo aussi aux musiciens et chef d’orchestre qui ont fait ressortir toutes les nuances de la partition en s’adaptant à chaque artiste.

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Site officiel de Svetlana Zakharova

Mille mercis à JMC pour la place.

  • Distribution du 04 avril 2012 à 19H30

 

Nikiya Svetlana Zakharova
Solor Stéphane Bullion
Gamzatti Ludmila Pagliero
L’ Idole dorée Emmanuel Thibault
L’ Esclave Grégory Dominiak
Manou Aubane Philbert
Le Fakir Allister Madin
Le Rajah Stéphane Phavorin
Le Grand Brahmane Yann Saïz
Soliste Indienne Sarah Kora Dayanova
Soliste Indien Cyril Mitilian
1ère Variation Héloïse Bourdon
2è Variation Charline Giezendanner
3è Variation Laurence Laffon

 

  • Bonus vidéo les saluts du 04 avril