Pierre-Arthur Raveau

Avant-goût de Dances at a gathering

Du 19 juin au 7 juillet, l’Opéra de Paris présente une soirée mixte, faite de Dances at a gathering de Jerome Robbins et de Psyché d’Alexei Ratmansky. De retour 3 ans après, Psyché est un ballet féerique sur la musique de César Franck. La pièce de Robbins a été crée en 1969. C’est un ballet qui ne raconte rien, c’est un dialogue entre la danse et la musique de Chopin. Samedi 31 mai, dans le cadre des Convergences, nous avons pu assister à une répétition publique menée avec humour et pédagogie par Clotilde Vayer. La maître de ballet qui remplacera bientôt Laurent Hilaire dans son poste d’associé à la direction de la danse dirigeait ce samedi, Héloïse Bourdon et Pierre-Arthur Raveau pour le pas de deux entre la « jaune » et le « vert », puis Sabrina Mallem qui dansera la « verte ».

Dans ce ballet sans histoire, on désigne les personnages par leurs couleurs de costumes. Ainsi, on a vert, jaune, brique, bleu, rose, mauve, violet. Il n’y a donc pas d’argument. Pour Robbins, ce ballet est un peu comme les Sylphides. C’est par la musique que les gens ont envie de danser.

La répétition commence. Clotilde Vayer insiste sur la bonne humeur qui doit émaner de ce ballet. C’est comme une grande journée ensoleillée, un beau jour d’été. Le sourire d’Héloïse Bourdon illustre à merveille ce bonheur de danser et de partager pour la première fois ce jour-là la scène avec P-A Raveau. Clotilde Vayer demande à plusieurs reprises que « ça bouge ». Le pas de deux, comme tous les autres du ballet est une conversation entre deux danseurs. C’est un jeu de questions de réponses et la chorégraphie de l’un et de l’autre se répondent. « C’est un jeu intimiste entre vous deux ». La maître de ballet insiste sur les intentions et sur les regards, mais aussi sur le jeu qu’il faut faire avec la musique. « Il n’y a pas plus musical que Robbins ». Pierre-Arthur Raveau montre à nouveau de très belles qualités aussi bien techniques qu’artistiques. Héloïse Bourdon quant à elle est une partenaire délicieuse, qui dégage une grande délicatesse. La grande exigence de Clotilde Vayer, les pousse à se surpasser, à tout donner, si bien qu’en 30 minutes les danseurs sont déjà en nage. Il est alors temps de les laisser souffler, puisqu’ils dansent le soir même dans Palais de Cristal.

 

Clotilde Vayer, Héloïse Bourdon et Pierre-Arthur Raveau, photographie d'IKAubert

La répétition se poursuit avec Sabrina Mallem qui interprétera la verte. C’est une variation qui a été crée par et pour Violette Verdy, que Clotilde Vayer a aussi dansé, coaché par M. Robbins lui-même. Clotilde Vayer nous explique que c’est une variation qui paraît très facile, parce qu’il y a peu de technique, mais qui en réalité ne l’est pas du tout. C’est une variation sur la musicalité. Toute cette variation est faite pour le public, contrairement aux autres, où les danseurs dialoguent entre eux de manière presque intime. La verte entre et elle regarde tout le public. Elle ouvre ses bras, et hop, c’est comme si quelqu’un lui marchait sur la robe. Elle ne fait pas les pas en entier, c’est une danseuse qui a de la maturité, elle ne montre pas en pas en entier. « C’est la mort d’un coupé jeté ». Il y a de nombreux pas empruntés au folklore ou à la comédie musicale. Clotilde Vayer donne tout son savoir à Sabrina Mallem qui ne ménage pas ses efforts. « tu vois là c’est salut Ghislaine Thesmar ». La maître de ballet est aussi bonne pédagogue avec ses danseurs qu’avec le public à qui elle ne manque pas d’expliquer chaque détail, chaque nom spécifique. Le salut Ghislaine Thesmar, c’est parce que Thesmar avait cette manière très particulière de faire sa révérence, en se prosternant devant son public. Clotilde Vayer passe ensuite à la deuxième partie, là où la verte va tenter d’établir un dialogue avec les hommes qui se baladent sur le plateau. « Tu fais tout pour qu’on te remarque », mais personne ne la voit. « Joue des coudes », elle s’agite devant un homme, on pense au Concert. Clotilde Vayer insiste sans cesse sur la musicalité et l’espace tout en faisant des rappels sur la technique « attention à tes bras en couronne, pas de petit chapeau… pousse des talons en avant ». Elle encourage, ne lâche pas sa danseuse pour lui faire parvenir à ce point d’équilibre où la variation est juste. Sabrina Mallem, écoute refait, avec beaucoup d’humilité et de talent. Elle se montre toutes ses qualités, notamment de très jolis bras et un beau port de tête. La répétition se termine. Clotilde Vayer nous dévoile la fin du ballet. « On regarde ». Mais on ne regarde rien, juste on regarde. On célèbre tout simplement la musique avec la danse.

Clotilde Vayer et Sabrina Mallem

A savoir, l’Opéra de Paris a récemment reçu le Prix Jerome Robbins décerné par la fondation Robbins.

Réserver des places pour la soirée Robbins Ratmansky (les soirées du 19 et du 21 sont précédées du défilé du ballet) , clic


Robbins – Ratmansky par operadeparis

Prix de la danse AROP 2013

Lundi 18 novembre se tenait la remise des prix de la danse AROP dans le Grand Foyer de l’Opéra Garnier. Chaque année, un comité sélectionne les jeunes danseurs qui peuvent se voir remettre le prix, qui n’est pas qu’une simple reconnaissance du public, il est accompagné d’un petit chèque. La plupart des lauréats de ce prix sont devenus des premiers danseurs, des danseurs étoiles, en tous cas, ils ont attiré à un moment de leur belle carrière le regard des spectateurs assidus de l’Arop.

Cette année, les prix de l’Arop ont récompensé Amandine Albisson et Pierre-Arthur Raveau. Comme un bonheur n’arrive jamais seul, les deux danseurs seront promus en janvier 2014 premiers danseurs.

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Amandine Albisson a 24 ans. Elle entre au ballet de l’Opéra de Paris à 17 ans en 2006. Elle est promue coryphée en 2009 et sujet en 2010. Elle a reçu le Prix Carpeaux en 2009. On a pu la remarquer dans La Sylphide l’été dernier, mais aussi dans le Rendez-Vous et Le Loup de Roland Petit. Danseuse très polyvalente, aussi à l’aise dans le classique que dans le contemporain, sa nouvelle promotion est le reflet de l’évolution de la compagnie. Technique solide, elle est aussi brillante dans Bayadère que dans Forsythe ou Anne Teresa de Keersmaecker. Son discours lors de la remise de prix fut court, mais déjà rempli d’émotions.

Pierre-Arthur Raveau a 22 ans. Il entre à l’Opéra en 2009, à l’âge de 18 ans. Il gravit très vite les échelons, puisqu’en 2010, il devient coryphée et en 2011 sujet. A l’école de danse de l’Opéra, il a reçu le Prix Jeunes Espoir AROP en 2009. Il a reçu le Prix Carpeaux lui aussi en 2011. On lui donne le rôle de Basilio la saison dernière au côté de la pétillante Mathilde Froustey. Il est un brillant James dans la Sylphide l’été dernier.

Bravo aux deux nouveaux lauréats !

Concours interne ONP 2013 hommes

Mercredi 6 septembre avait lieu le concours hommes interne de l’Opéra de Paris. Le jury était composé de Brigitte Lefèvre, Laurent Hilaire, Clotilde Vayer, Benjamin Millepied, John Neumeier, Lionel Delanöé (suppléant), Eleonora Abbagnato, Josua Hoffalt, Alessio Carbone, Lucie Clément, Pascal Aubin et Benjamin Pech (suppléant).  Je n’ai pas assisté aux quadrilles et aux coryphées. Vous ne lirez mes impressions que pour les sujets. Si vous décidez de laisser un commentaire, le concours étant toujours un sujet « bouillant » et objet de controverse, merci de rester cordial.

  • Quadrilles

Variation imposée : La Belle au bois dormant, acte 3, Pas de cinq des pierres précieuses. Noureev. Préparée avec Jean-Guillaume Bart. En vidéo, clic (à 2’40)

Nombres de postes à pourvoir : 2

Résultats :

1. Hugo Marchand, promu
2. Germain Louvet, promu
3. Cyril Chokroun
4. Florent Mélac
5. Antonin Conforti
6. Antonin Monié

Germain Louvet, Paquita, Acte II, Grand Pas, variation de Lucien, Pierre Lacotte
Hugo Marchand, Tchaikovski – Pas de deux, George Balanchine
Florent Melac, Le Lac des Cygnes, acte III, variation de Siegfried, Rudolph Noureev
Antonin Monié, Tchaikovski – Pas de deux, George Balanchine
Cyril Chokroun, Grand Pas classique, Victor Gsovsky
Antonio Conforti, Roméo et Juliette, acte I, variation de Roméo, Rudolph Noureev
Takeru Coste, Raymonda, Acte II, 2ème variation d’Abderam, Rudolph Noureev

  • Coryphées

Variation imposée : Paquita, grand pas, variation de Lucien. Chorégraphie Pierre Lacotte. Préparée avec Laurent Novis. En vidéo, clic (à 1′)

Nombre de postes à pourvoir : 2

Résultats :

1. Axel Ibot, promu
2. Sébastien Bertaud, promu
3. Alexandre Gasse
4. Adrien Couvez
5. Maxime Thomas
6. Hugo Vigliotti

Yvon Demol, Notre-Dame de Paris, variation de Frollo, Roland Petit
Grégory Dominiak, Appartement, variation de la télévision, Mats Ek
Alexandre Gasse, L’arlésienne, dernière variation de Frédéri, Roland Petit
Axel Ibot, Dance at a Gathering 1ère variation du danseur en brun, Jerome Robbins.
Mickaël Lafon, La Bayadère, Acte II, variation de Solor, Rudolph Noureev
Jérémy-Loup Quer, La Bayadère, Acte II, variation de Solor, Rudolph Noureev
Maxime Thomas, Dance at a Gathering 2e variation du danseur en brun, Jerome Robbins.
Hugo Vigliotti, Le Rire de la lyre, José Montalvo
Sébastien Bertaud, Push comes to shove, Twyla Tharp
Matthieu Botto, Le Lac des Cygnes, acte III, variation de Rothbart, Rudolph Noureev
Adrien Couvez, Push comes to shove, Twyla Tharp

  • Sujets

Variation imposée : Giselle, acte II variation d’Albrecht, Coralli & Perrot. Préparée avec Andrey Klemm. En vidéo, clic

Nombre de poste à pourvoir : 2

Résultats :

1. Pierre-Arthur Raveau, promu
2. François Alu, promu
3. Fabien Révillion
4. Marc Moreau
5. Daniel Stokes
6. Florimond Lorieux

Florimond Lorieux, Dance at a Gathering 1ère variation du danseur en brun, Jerome Robbins.
Allister Madin, Other Dances, 1ère variation, Jerome Robbins
Julien Meyzindi, La maison de Bernarda, Mats Ek
Marc Moreau, Arepo, Maurice Béjart
Pierre-Arthur Raveau, Marco Spada, acte II, variation de Marco Spada, Pierre Lacotte
Fabien Révillion, Donizetti Pas de deux, Manuel Legris
Daniel Stokes, Notre-Dame de Paris, variation de Frollo, Roland Petit
François Alu, Le Fantôme de l’Opéra, Acte I, variation du fantôme, Roland Petit
Yannick Bittencourt, Suite en blanc, Marzurka, Serge Lifar

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Mes impressions : La variation imposée demandait une belle maîtrise technique, notamment en matière d’entrechats et de tours bien maîtrisés. On attendait de belles arrivées en 5ème position. Des danseurs se sont donc distingués par une maîtrise impeccable. François Alu signe encore une très beau concours dès cette première variation. Tout lui semble toujours aussi aisé. Pierre-Arthur Raveau montre lui aussi une très grande technique doublé d’une interprétation où on le sentait très investi. Fabien Révillion n’est pas en reste, avec des réceptions très silencieuses, bien en 5ème. On remarque aussi les beaux entrechats de Marc Moreau, le ballon d’Allister Madin, les suspensions de Julien Meyzindi, les lignes et le romantisme de Florimond Lorieux.

Les variations imposées permettaient de montrer la couleur artistique de chacun. Gros coup de cœur pour le Fantôme de l’Opéra de François Alu, qui montre une fois de plus son talent, non seulement technique, mais d’interprète. Fabien Révillion est particulièrement charmant et bondissant dans son Donizetti-Pas de deux. Il montre une belle énergie et il est très convaincant. Pierre-Arthur Raveau montre de nouveau une belle technique dans son Marco Spada et déploie toute son énergie dans ce personnage de noble bandit. Daniel Stokes propose un Frollo qui manque un peu de perversion, mais qui ne démérite pas pour autant. Marc Moreau s’attaque à la variation difficile d’AREPO et s’en sort bien, même si je reste sur ma réserve sur le style proposé. On a en tous les cas la sensation d’assister à un très joli concours. J’avais une petite préférence pour le style de Révillion, j’espère qu’on le verra bientôt dans des rôles plus importants.

A la sortie des artistes, François Alu est applaudi par le public, qui semble touché par ce geste. A quand la nomination ?

PAR par Sébastien Mathé

Don Quichotte avec Mathilde Froustey et Pierre-Arthur Raveau

La salle n’était pas pleine hier soir à Bastille. Pourtant les balletomanes ne s’y sont pas trompés en venant assister à la première représentation de Mathilde Froustey en Kitri. On peut dire qu’hier soir Mathilde Froustey a eu sa revanche sur le concours. Le public a été conquis par sa technique, brillante, et son interprétation, intelligente. Ce que Froustey a et qui charme tout le monde, c’est son amour du partage en scène. Elle donne sans relâche. La soirée fut en crescendo et la belle danseuse m’a eue là où je ne l’attendais pas.

L’acte I est sans doute un des plus difficiles du répertoire car il nécessite une bonne endurance. On a senti les deux protagonistes un peu stressés, notamment dans les portés. L’entrée en scène de Kitri est réussie, le premier temps levé est puissant, imposant, et la place entière de Barcelone ne peut que la suivre des yeux.

L’espièglerie de Froustey n’est plus à démontrer. Elle joue à merveille cette chipie amoureuse et séductrice. Les passages vifs sont piquants et enlevés. Le couple formé par Pierre-Arthur Raveau apporte beaucoup de fraîcheur à ce ballet.

J’ai beaucoup ri de voir Takeru Coste en Sancho Pança. Il avait une pantomime claire et semblait bien s’amuser à jouer ce personnage gourmand et ivrogne.

Époustouflante, Kora Dayanova en danseuse de rue, qui de ses yeux de biche, séduit tous les toréros. Elle a vraiment un style plein d’élégance et de finesse qui s’accordait à merveille avec Christophe Duquenne, débordant de virilité.

Au deuxième acte, la première scène est l’occasion d’admirer une fois de plus les talents d’Allister Madin. Son chef gitan est un régal. Il mange la scène et s’impose avec beaucoup de facilité.

Je suis en revanche toujours perturbée par ce début de deuxième acte qui est sur la même musique que le premier acte de Bayadère, mais ce passage avait le mérite de revoir le couple Kitri Basilio dans un adage bien mené et plein de tendresse.

La surprise et l’émotion sont venues pour moi à la scène du rêve de Don Quichotte. Au milieu des dryades, Kitri devient Dulcinée et c’est avec une grande élégance que Mathilde Froustey est passée de l’une à l’autre. Je n’aime pas trop ce passage chorégraphique, je préfère de loin la version Bolchoï qui est plus lisible pour le spectateur. Chez Noureev, on se perd un peu entre Cupidon, la reine des Dryades et Dulcinée. Mathilde Froustey a réussi à être au-dessus avec beaucoup de grâce. Ainsi, Don Quichotte ne pouvait voir qu’elle. Sa variation est un délice, elle est très musicale et enchaîne de très beaux équilibres. Le chef d’orchestre la suit, leur complicité est rare en danse et nous avons eu le droit à une très belle interprétation musicale. Cet acte II devient magique, quand il a d’ordinaire l’habitude de m’ennuyer.

Au troisième acte, on atteint des sommets. Froustey est déchaînée, elle profite de toute la scène et domine la chorégraphie. Elle offre au public de la danse et non un simple enchaînement de variations vues et revues. Elle nous donne à voir un équilibre arabesque magnifique qui dure, qui dure, qui dure… Le public en devient fou ! Le chef d’orchestre ne la quitte pas des yeux pour relancer la note suivante. Battement de cils de la belle et l’audience crie bravo ! Elle risque des fouettés difficiles ( 4-3-4) et se joue des ratés, enchaîne les tours. Elle danse, danse, danse encore et garde cette audace de la scène.

Le public est aux anges, moi la première. Ovation et pluie de bravos pour la belle danseuse. De ma place je la vois remercier chaleureusement chef d’orchestre et musiciens. Une très belle soirée.

NB : ne plus accepter le premier rang de Bastille. Contrairement à Garnier, on ne voit pas les pieds.

Distribution du 5 décembre

Kitri Mathilde Froustey
Basilio Pierre Arthur Raveau
La Reine des Dryades Héloïse Bourdon
Espada Christophe Duquenne
La Danseuse de rue Sarah Kora Dayanova
Cupidon Marine Ganio
Le Gitan Allister Madin

Séance de travail Balanchine

Retour à Garnier pour la première fois de la saison, cela ne pouvait pas se passer facilement ! Outre le défilé des Galeries Lafayettes qui occupait le quartier, mes lunettes sans qui je suis complètement dans le flou, avaient décidé de divorcer. Chouette, aller voir un spectacle sans lunettes…. Certes, il n’y a pas de sur-titres, et je connais les chorégraphies, mais quand même ! Bref, j’ai passé une soirée dans le flou ou les yeux collés à mes jumelles seul moyen pour moi de voir la danse ! Chers danseurs, hier dans mes yeux vous étiez tous doublés, ce qui avait un effet grandiloquent. Parlons plutôt des ballets que vous pourrez voir à partir de lundi prochain au Palais Garnier.

Le programme est composé de trois ballets, tous trois très différents.

Le premier est Sérénade. C’est un ballet qui a été créé en 1934. C’est une des premières créations « outre-atlantique », peu de temps avant la fondation du NYC Ballet. Pas d’argument dans cette petite pièce sur une musique de Tchaïkowsky. Balanchine a fait avec les moyens du bord. Premier jour de répétition, il y avait une vingtaine de filles, le surlendemain, plus que six. Qu’à cela ne tienne, il écrit la chorégraphie, le mouvement doit continuer. Une fille entre en pleurant dans le studio ? On conserve alors cette entrée. C’est cela qui fait la douceur de pièce. Elle regorge de petites pépites, d’intentions dissimulées ça et là. Balanchine n’a eu de cesse de modifier cette pièce, en ajoutant ou retirant des détails, des regards, parfois même des gestes entiers. On peut s’inventer une histoire alors qu’il n’y en a pas. Les longs tulles bleus renforcent cette idée romantique, peut être d’une passion entre un danseur et cette jolie blonde qui arrive au cours en retard. Il n’en est rien, mais rien ne vous empêche de laisser aller votre imagination.

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Dans mes jumelles, j’ai tout de même aperçu Eleonora Abbagnato, pour ma plus grande joie. Mathilde Froustey et Myriam Ould Braham ont aussi déjà offert du spectacle !

Le deuxième ballet proposé est de loin mon préféré. Il s’agit d’Agon, ballet de 1957. Sur une musique de Stravinsky, qui peut vous sembler sans mélodie, Balanchine construit une chorégraphie qui ne manque pas d’innovation. Ce « combat » est plus une « battle » entre la danse et la musique, car il ne faut jamais en perdre le rythme. La virtuosité technique exigée par Balanchine rappelle la complexité de la partition et il se construit un dialogue entre les deux qui m’emmène dans un imaginaire fabuleux. On peut dire qu’Agon fait partie des ballets en noir et blanc au même titre que Les 4 Tempéraments (que j’adore!), où les pas de deux succèdent aux pas de quatre, sans transition et pourtant on n’en perd pas pour autant le fil.

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Le dernier ballet est Le Fils Prodigue. Il a été écrit pour Serge Lifar, dans Les Ballets Russes de Diaghilev, en 1929. La version présentée date de 1957, Balanchine avait l’habitude de remanier ses ballets. L’argument est fort simple. Un fils veut plus de liberté, et quitte le foyer familial. Il se fait voler par ses deux compères, puis il rencontre un bande de lutins, qui le mettent dans les bras d’une femme envoutante et dominatrice qui finit de le ruiner. Il se retrouve seul et en guenilles. Il rentre alors chez son père, qui est heureux d’enfin le retrouver. La chorégraphie ressemble beaucoup à du Roland Petit et on ne peut pas s’empêcher de penser au Jeune Homme et la Mort. On est dans une écriture assez fine, résolument contemporaine avec un langage néoclassique. La musique de Prokofiev sert la narration, car elle l’accompagne et insiste sur les moments forts de la vie de ce jeune homme. En même temps, cette musique offre au chorégraphe des changements de rythme fabuleux pour monter une chorégraphie d’une grande modernité. Hier soir, Je n’ai pas quitté des yeux, des jumelles Agnès Letestu… Quelles jambes !

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Les distributions sur le site de l’Opéra de Paris

Allez je m’en vais me racheter des yeux pour y voir quelque chose à la première de lundi !