Cette année, je passe mes vacances au Japon. C’est un rêve pour moi de découvrir ce pays. Je ne pensais pas alors aller au ballet (je pensais bien aller faire un tour au kabuki) mais la danse m’a rattrapée. Quand Naomi m’a proposé un billet, je ne pouvais pas résister. Après une longue balade dans le trésor agréable parc Ueno je retrouve Naomi devant le Tokyo Bunka Kaikan. Retour sur le programme B du 8 août.
Quand les Japonais organisent un gala, ils ne font pas les choses à moitié. Un programme alléchant, les plus grandes étoiles, un bon orchestre, bref on est loin du gala où les stars finissent par s’absenter et où la sono livre un mauvais son. La salle est pleine à craquer, le spectacle peut commencer.
Après une présentation du programme en musique, le premier pas de deux, Diane et Actæon, interprété par Viengsay Valdés et Osiel Gouneo, est un feu d’artifice de technique. D’ailleurs, chaque prouesse est chaleureusement applaudie par le public nippon. Il y a de quoi, surtout devant la coda, avec d’audacieux fouettés. Cendrillon, dansé par Iana Salenko et Vladimir Malakhov, ramène plus de féerie. C’est très élégant et délicat ; il faut dire que Iana Salenko a un port de tête somptueux et de beaux bras. Changement d’ambiance avec One for my baby (chorégraphie de Twila Tharp) dansé par Igor Zelensky.si la musique de Sinatra est distrayante, la danse l’est moins. C’est assez répétitif et monotone, comme une balade triste un dimanche après-midi. Je passe à côté de Peter Gynt : oui 11h de vol la veille ça fatigue un peu. C’est le très beau Dream Adagio de Raymonda qui me replonge dans un monde magique, avec une Lopatkina évanescente à souhait. Un paradigme de raffinement.
Les entractes sont minutieusement réglés, des horloges décomptent le temps restant. Mathias Heymann et Liudmila Konovalova ouvrent la deuxième partie avec le pas de deux de La belle au bois dormant. Comme à son habitude, l’étoile française semblait ne pas toucher terre tant l’on n’entendait aucun bruit lors de ses réceptions. Sa partenaire rayonne et le résultat est très réussi. Après cela, il y avait le très beau No man’s Land chorégraphié par Liam Scarlett. Au piano, Frédéric Vaysse-Knitter accompagne avec talent Alina Cojocaru et Johan Kobborg. Les lignes des deux danseurs se mêlant dans une atmosphère très sombre, les attitudes lassives laissent place à des portés très impressionnants. Un gala n’est pas un gala sans un Corsaire bien éxécuté. C’est chose faite avec Sarah Lamb, dont j’ai particulièrement apprécié les ports de bras et Vadim Muntagirov à la belle technique mais qui n’en fait pas des tonnes dans l’interprétation. Un mélange savamment dosé. Fan d’Oscar, pas de Béjart. Je reste toujours indifférente à ces Danses grecques malgré le charme certain de celui qui est aujourd’hui l’une des figures emblématiques du Béjart Ballet Lausanne. J’étais tellement passée à côté des adieux d’Aurélie Dupont (si, si) que je ne pensais pas être aussi émue en gala. Et bien, Aurélie Dupont et Hervé Moreau, c’est une alchimie certaine qui a su me donner des frissons. C’était très beau.
La troisième partie s’est placée sous le thème des amours passionnées. A part Les bourgeois, pièce de gala sans grand intérêt hormis celui de voir Daniil Simkin bondir toujours plus haut, les pas de deux amourachés se succèdent. C’est tout d’abord le tourbillonnant Romeo & Juliette de Kenneth MacMillan qui donne le ton. Remarquablement dansé par Iana Salenko et Steven McRae. Puis Alicia Amatrian et Friedemann Vogel dansent Légende de Cranko avec beaucoup de finesse et de subtilité. Comme dans Onéguine, la chorégraphie est une vraie dentelle, dont les chemins sinueux nous égarent pour mieux nous émouvoir. Le piano a sauvé La Dame aux camélias. Je n’ai pas aimé l’interprétation exaltée de Tamara Rojo, donnant beaucoup d’épaules comme pour prendre le dessus sur son partenaire. La jolie petite fable de Diana Vishneva et Vladimir Malakhov termine cette partie avec beaucoup de poésie.
La quatrième et dernière partie offre le moment le plus gracieux de la soirée, avec Ulyana Lopatkina dans La mort du cygne. Elle vogue sur la scène tandis que les notes du violoncelle font vibrer ses bras avec la plus grande finesse qu’il soit. Je ne sors pas de cette douceur et, par conséquent je passe à côté de Sylvia, malgré sa belle exécution par Silvia Azzoni et Alexandre Riabko. J’ai préféré la dame de Maria Eichwald à celle de Tamara Rojo : plus fine, plus subtile, accompagnée avec brio par Marijn Rademaker. Ce fut ensuite une joie immense que de voir Isabelle Guérin et Manuel Legris danser La Chauve-souris. Drôles, brillants, débordants d’énergie, ce fut un des moments les plus réjouissants de la soirée ! La soirée se finit en grandes pompes avec Maria Alexandrova et Vladimir Lantratov qui dansent comme il se doit le pas de deux de Don Quichotte.
Superbe moment que ce beau gala ! Je comprends mieux pourquoi les danseurs aiment tant se produire au Japon. Pas un bruit dans la salle, aucun téléphone sorti pendant le spectacle, des applaudissements généreux et une foule enthousiaste à la sortie des artistes. Merci à Naomi pour la place.
Dimanche, toujours rien à Garnier… vivement jeudi que j’y aille pour la séance de travail des Enfants du Paradis. Heureusement qu’il y a la retransmission des ballets du Bolchoï au
cinéma. Cet après midi je vais voir Le Lac des cygnes dans une version que je ne connais pas du tout. Je rate le prologue à cause d’un léger retard de métro. J’arrive en plein premier acte, et c’est avec plaisir que je vois le bouffon entrer en scène. J’aime bien ce rôle, il permet de donner un troisième rôle masculin important. Ce soir il est dansé par Lopatin. Les danses du corps de ballet sont belles. Les costumes tons or et argent donnent un aspect très noble à cette cour. Le petit pas de trois est assez réussi malgré une deuxième soupirante qui a tendance à s’emmêler les pinceaux. La variation du prince est impeccable, je suis juste étonnée qu’il ne batte pas ses assemblés. Ceci-dit ses envolées sont amples et tombent dans des cinquièmes bien fermées, ce qui donne un air rigoureux à ce personnage. Lopatin quant à lui m’émerveille dans sa variation où il accomplit de très beaux fouettés. Les emboîtés, par contre, frôlent le ridicule dans cette variation. La danse des coupes est celle que j’avais vu en grande leçon au CNSMDP et c’est vrai que c’est tout de même pas mal en danse de couples.
Au deuxième acte, je suis très surprise par la scène de l’entrée d’Odette. J’avais du mal à imaginer Alexandrova en cygne. Elle a ce côté pétillant qui donne du corps à des rôles
comme Kitri ou Jeanne comme on a pu le voir récemment. En Odette, pas
de sourire, et c’est bien dommage, car c’est tout de même cela qui fait le charme d’Alexandrova. L’entrée d’Odette se fait sans pantomime. Pas d’explication sur ce lac avec des cygnes, pas d’explication sur cette princesse enfermée dans le corps d’un cygne. Ici c’est un oiseau, dominé par un être maléfique. Elle a un regard désespérée qui charme le prince. C’est bizarre cette entrée d’Odile sans la pantomime, ça a moins de sens, on ne comprend pas bien pourquoi il tombe amoureux d’elle. L’acte blanc est superbe. Enfin quatre petits cygnes impeccables, avec des têtes liées, de la légèreté, bref quelque chose qui a du sens, et qui danse ! La coda qui est mon passage préférée est très rythmée, Alexandrova peut s’y exprimer dans un travail de pointes et de bras
assez admirable.Je reste cependant sceptique sur le choix d’Alexandrova qui n’a définitivement pas le physique d’un cygne et dont le tutu blanc ne met pas le corps en valeur.
Le troisième acte semble toujours un peu long en attendant l’arrivée d’Odile et de Rothbart. A mon étonnement, les danses traditionnelles, différentes de celles qu’on voit ici
dans la version Noureev, sont beaucoup plus intéressantes. L’espagnole est superbe, pleine de vie, la napolitaine est réjouissante, seul petit point faible, le tambourin ne produit aucun son, la danse hongroise est un défilé de petites poupées, et la danse bulgare (ou russe cela dépend des versions..) est elle aussi pleine de surprises. Toutes sont sur pointes avec jolies danseuses, qui en toute logique deviennent les fiancées proposées au prince. Cela a d’ailleurs plus de sens que dans la version Noureev où surgissent de nulle part, six fiancées pour le prince. L’arrivée de Rothbart et d’Odile me fait pouffer de rire par tant de kitsch ! Un rideau tombe au milieu de la scène ; dessus deux cygnes s’enlacent, un blanc un noir. Rothbart vient avec une armée de cygnes noirs (j’exagère, six !) qui encadrent la scène. J’ai adoré Alexandrova en Odile, les deux variations sont impeccables. Et oui car dans cette version il y a la deuxième variation d’Odile que j’aime tant. Le duo avec Rothbart est génial, le jeu de séduction est maléfique. Le piège est bien ficelé, on se laisse embarquer malgré le décor kitsch.
Au quatrième acte, je décroche. Peut être est-ce le fait que ce soit au cinéma ou bien parce que je reste très contente de la performance d’Alexandrova en Odile. Je ne sais pas.
L’orage mêle cygnes noirs et blancs, pas de fin Walt Disney (il y a déjà suffisamment de kitsch comme cela) heureusement ! Pas d’émotions pour moi dans ce dernier acte, je reste à côté.
Comme d’habitude j’ai passé un bon moment au cinéma. Je trouve l’initiative très bonne. J’ai appris récemment que les ballets par le Bolchoï attiraient plus de monde que ceux de l’Opéra de Paris. L’an prochain, on pourra voir Esmeralda, La Belle au bois dormant, Casse-Noisette, Le Corsaire, Le Clair Ruisseau et Raymonda. Je vous en reparlerai d’ici là bien entendu.
Musique : Piotr Ilyich Tchaikovsky
Libretto: Yuri Grigorovich
Choréographie : Yuri Grigorovich
Scènes choreographiées par : Marius Petipa, Lev Ivanov, Alexander Gorsky
Mise en scène revue par : Margarita Prokudina
Odette : Mariya Aleksandrova
Prince Siegfried : Ruslan Skvortsov
Rothbart : Nikolay Tsiskaridze
Musique par l’Orchestra of the State Academic Bolshoi Theatre of Russia
Maîtres de ballet : Svetlana Adyrkhaeva, Lyudmila Semenyaka, Marina Kondratieva, Tatiana Krasina, Nikolay Fadeechev, Vasiliy Vorokhobko, Valeriy Lagunov
Il est plaisant d’aller au ballet avec des novices, qui ne connaissent rien à la danse. J’aime voir mes amis découvrir quelque chose qu’ils ne connaissaient pas. Je les observe dans le noir, regarder ce qui se déroule sous leurs yeux. J’appréhende un peu l’entracte quand je leur demande « alors ça te plaît? ». Je repense à mon amie F*** dont le visage s’est illuminé et qui m’a répondu « C’est tout ce que j’aime » lors d’un hommage à Jérôme Robbins. Un amoureux que j’avais emmené voir pour la première fois un ballet de Kylian était ressorti bouche bée devant le travail des danseurs. Les jours qui suivaient, étaient rythmés par des « que c’était beau ce ballet ». Cette phrase revenait quand je l’ai emmené en voir d’autres.
Il est tout aussi plaisant, et ce pour des raisons différentes d’aller voir un ballet avec un (ou plusieurs) balletomane, qui comprend notre soif de voir, de comprendre, de vivre des émotions à chaque fois différentes en allant voir un ballet plusieurs fois. J’ai donc passé un week-end Bolchoï avec Pink Lady, tout aussi excitée que moi à l’idée de voir deux Don Quichotte et un Flammes de Paris en deux jours. Pour cela, il nous fallait une sacrée organisation, n’ayant pas de places pour la journée du samedi. Nombre de messages envoyés : 33 plus ceux via Twitter 19 pour une organisation bien réglée.
Pour le Don Quichotte de 14h30, j’obtiens un fond de loge à 8€ très bien placé (deuxième loge de côté n°23). Assise sur le dossier de ma chaise, je vois toute la scène.
J’ai de grandes attentes de ce Don Quichotte « en vrai ». J’avais vu Osi/Vasi au cinéma et c’était remarquable. J’étais restée bouche bée.
Le prologue dévoile la pantomime et le jeu entre Don Quichotte et Sancho Pancha me fait rire d’entrée. J’ai toujours apprécié l’humour guignolesque à la Scapin et les farces de
Sancho Pancha m’amusent comme une enfant. Le premier acte débute, Kitri entre sous les traits de Kryssanova. Ses premiers pas sur scène me semblent raides. Je la trouve un peu coincée dans cette première variation qui doit être une explosion et qui ne produit pas chez moi l’effet attendu. Je trouve qu’il lui manque un air mutin. Ce n’est pas assez caliente à mon goût. Elle a néanmoins de très belles jambes qu’elle sait mettre en valeur dans de jolies arabesques. Elle se décoince et devient plus coquine quand le marquis fait son entrée. La danse des tambourins et des éventails est un moment réjouissant qui participe de la grande fête qu’est Don Quichotte. Mon moment kitch adoré (il y en a plein d’autres dans ce ballet) est l’entrée des toréos. Ca en jette, c’est puissant et c’est mené par un Merkuriev dont la cape et la coupe de cheveux s’accordent à souhait. Merkuriev vous capte de son regard et ne vous quitte plus des yeux. De même avec sa partenaire, qui en passant est géniale, ils ne se lâchent pas, l’intensité est puissante.
Retour de Kitri et de Basilio sur la scène, avec un Lopatin très léger, très juvénile dans le bon sens du terme. J’apprécie son jeu, son interprétation de jeune fougueux. Kitri se lâche au fur et à mesure du premier acte et adopte de plus en plus une attitude espagnole. La diagonale des toréadors est très réussi. On est au comble de la fête et l’acte I annonce de jolies choses pour la suite du ballet. A noter, le cheval sur lequel arrive Don Quichotte a disparu. Pink Lady m’avoue que la veille la scène a failli mal se passer ! Il n’y a que les Russes pour faire venir un vrai cheval sur scène. Est-ce que dans leur Bayadère, Solor arrive sur un vrai éléphant?
L’acte II débute dans une taverne où Kitri et Basilio ont pris la fuite. Dans ce passage, j’adore les passages de danses traditionnelles avec les robes de flamenco qui n’en
finissent pas. Retour du beau Merkuriev qui une fois de plus donne une leçon de caractère. L’arrivée du père de Kitri provoque la scène d’humour que j’aime beaucoup où Basilio fait croire à un suicide. Kryssanva s’y montre belle comédienne, la scène fonctionne bien. Le pas de deux entre Kitri et Basilio.
L’opéra n’est pas plein. L’Arop a du céder des places mais le prix a du en faire fuir beaucoup. Le décor n’en est pas moins sublime, fait de roses et de pivoines (mes fleurs préférées), dans des tons très romantiques, très poudrés qui me plaisent beaucoup.
Le rideau se lève après la mise en place des musiciens. Sur la scène, des soldats, certains sur une petite scène surélevée. Le ton est tout de suite donné. Amis révolutionnaires, la cocarde et le bleu, blanc, rouge sont au rendez-vous. Lantratov fait son apparition sous les traits de Philippe, jeune soldat marseillais, et Alexandrova sous ceux de Jeanne, jeune paysanne qui veut quitter le nid familial. Le frère de Jeanne, Jérôme, dansé par Denis Savin, est animé par un désir de l’engagement révolutionnaire. Il sent que son destin peut basculer et qu’il faut qu’il saisisse sa chance. D’un simple baiser, Philippe et Jeanne tombent amoureux. Jérôme s’engage aux côtés de Philippe ; les deux jeunes paysans doivent faire leurs adieux à leurs parents. Alexandrova montre dans ces quelques moments de pantomime de grandes qualités. Elle n’en fait pas trop et son jeu n’en est pas moins explicite. J’adore ce grand sourire qui illumine son visage, mais qui ne la rend pas niaise. Après ces adieux, les deux jeunes gens traversent la forêt et rencontrent en chemin le Marquis Costa de Beauregard, qui chasse. Il est très facile dans le ballet d’identifier les classes sociales par les costumes. Les nobles sont en noir et blanc, perruques et poudre tandis que les révolutionnaires arborent des costumes bleu, blanc, rouge. Jeanne plaît au marquis, et c’est assez brutalement qu’il lui fait comprendre ses intentions. Une fois encore la pantomime est bien jouée, encouragée par la musique qui souligne l’angoisse de la situation. Jérôme arrive au secours de sa sœur et parvient à la faire s’échapper. Lui tombe entre les griffes du marquis et est jeté dans un cachot. Adeline la fille du marquis tombée sous le charme du jeune héros, le délivre de ses chaînes. La jeune femme est dansée par Anna Rebetskaya, que je trouve très élégante dans sa danse, où tout est finesse et raffinement.
Nous arrivons au Palais Royal. Toute la cour débarque en grandes pompes, perruque, poudre et crinoline, couleurs pastels et tissus luxueux. J’apprécie le bal que je trouve très
élégant, la construction rompt complètement avec ce que l’on vient de voir précédemment. Tout est structuré et ordonné, on retrouve les formes chorégraphiques traditionnelles du cercle et des lignes de bal. Le rythme est ralenti par rapport au reste du ballet, où tout bouge en permanence. Là on prend le temps de s’aligner pour danser. Je suis séduite par cette entrée en matière, mais si déçue par ce qui suit. Un ballet dans le ballet. Ce petit divertissement que l’on retrouve parfois dans les grands ballets, comme dans La Dame aux Camélias (on regarde au théâtre L’histoire de Manon). Je suis assez réticente à ces mise en abîme qui viennent, à mon sens, alourdir la trame narrative et qui peuvent perdre en route quelques spectateurs non avertis. Je ne comprends pas l’intérêt narratif et chorégraphique, si ce n’est donner un second rôle à un(e) soliste frustré(e) de ne pas avoir le premier. Dans Flammes de Paris, nous avons donc le droit à Rinaldo et Arminde. Cela s’accorde très bien avec tout le kitch du ballet en général. Ce divertissement raconte l’amour naissant de ce jeune prisonnier qu’est Rinaldo et Arminde, dont l’armée vient de rentrer. Je commence par trouver le costume d’Arminde très laid. Noir et rouge, brodé de doré, avec des plumes rouges et blanches sur la tête, des « guêtres » noir, rouge et doré, les pointes noires coupées au bout qui est grisâtre et plein de colophane, comme dirait Anne Teresa de Keersmaeker, cet « emballage cadeau » me fait un peu peur. Je n’ai pas entièrement tort car côté chorégraphie, ce n’est pas mieux. Quel ennui, la fatigue de la journée me reprend et je lutte pour ne pas fermer les yeux. Cette danse met en valeur la ballerine qui est sans cesse placée au centre. Ceci est renforcé par le décor et la scénographie où les nobles du bal royal sont à présent assis sur les côtés et regardent ce ballet-drama. Pour la belle Arminde, tout se joue dans dans le bas de jambe. Le problème c’est que je ne trouve pas que Nina Kaptsova ait un très joli coup de pied et les guêtres ne mettent pas du tout en valeur ses mollets. Ce qui m’a plu par contre c’est tous les passages d’Amour qui lance des flèches sur la princesse et le prisonnier. La danseuse est très légère, et a de très belles lignes. Tous les petits sauts éveillent un peu ce ballet qui ressemble trop à un vilain tableau. La variation de ce petit Cupidon, m’a fait penser à celle de Don Quichotte pendant le rêve de ce dernier. L’adage entre Arminde et Rinaldo ne finit pas de m’ennuyer. Arrive la fin de l’histoire, accrochez-vous, c’est costaud. Le fantôme de feu la fiancée de Rinaldo revient (comme quoi même mort, la jalousie en torturent encore quelques-uns), emporte Rinaldo dans un bateau (Oh my god, on dirait un mauvais remake du Corsaire, souvenir douloureux), mais Arminde déclenche l’orage, ramène ses furies (créatures mi diable, mi chauve souris, mi ce que vous voulez de maléfique), Rinaldo tombe à l’eau et hop se retrouve mort aux pieds d’Arminde. Fin du drame, que de larmes versées dans les rangs des crinolines assises, qui viennent féliciter les deux comédiens. Moi à ce moment là je me dis que j’ai perdu le fil, que cet intermède n’a décidément aucun intérêt.
Encore un peu d’ennui avant l’entracte, entrée du roi et de la reine. Le roi nous fait une démonstration de tour en l’air en sixième, repris par sa cour. Une fois d’accord, mais
plusieurs fois vraiment? Bon alors nous voilà partis pour une danse de cour qui a le mérite d’être drôle, mais qui chorégraphiquement est creuse. La marseillaise tonne dans le fond de la scène, les Marseillais envahissent l’espace. La panique naît chez les nobles, et Adeline en profite pour fuir le palais royal. La salle est plutôt froide à la fin du premier acte, et j’avoue que je ne suis pas conquise, non pas par les interprètes, car je trouve qu’ils ont dans leur danse quelque chose d’unique, une fougue, une âme bien particulière, mais par la chorégraphie en elle-même.
Entracte de gala dit champagne, makis délicieux de l’Opéra et macarons. Il y a aussi les délicieuses pâtes au pesto que Pink Lady a découvert lors du cocktail deRoméo et Juliette. Miam, se remettre d’aplomb avant d’attaquer le deuxième acte qui est beaucoup plus réjouissant que le premier.
Après ces rafraîchissements et mon observation scrupuleuse des tenues de soirée, retour dans la loge pour le deuxième acte. C’est un acte dynamique, qui est sans cesse en
mouvement, où la foule ne s’arrête jamais. C’est une grande fête, dans laquelle Marie Antoinette et Louis XVI sont démembrés avec une liesse étonnante.
Jeanne danse sur la Carmagnole. Au début de cet acte, elle n’est pas en pointe mais en chaussure de caractère et j’ai apprécié qu’on voie la soliste danser autrement. Alexandrova se montre
complètement absorbée par le rôle. J’ai adoré les fois où elle brandit le drapeau et l’agite. Son visage était illuminé. J’ai complètement été sous le charme de son sourire, par lequel elle donne beaucoup. Chacun de ses saluts sont une vraie révérence au public.
Le passage très rythmé, après le petit pas de deux entre Jérôme et Adeline, où les danseurs frappent des pieds emmenés par une Jeanne hystérique de bonheur de faire cette révolution, est un de mes préférés. La salle se réchauffe un peu d’ailleurs à ce moment-là et le public semble y prendre plus de plaisir.
La danse basque laisse entrevoir les qualités des garçons de cette compagnie, avec une série de sauts en l’air et autres pirouettes.
Retour des comédiens du premier acte, qui dansaient pour la noblesse, les revoilà mais cette fois pour danser pour le peuple. Véritable fresque, le tableau n’a pas
d’intérêt chorégraphique. C’est un défilé d’odalisques au bonnet phrygien, on pourrait presque renommer le passage la liberté guidant le peuple, même si le tableau me fait beaucoup plus d’effet que ce passage là. Arrive enfin le fameux pas de deux, où les étoiles russes peuvent nous éblouir par leur technique qui défie les lois de la gravité. Maria Alexandrova est délicate, tout en finesse dans ses mouvements, sans jamais perdre son énergie. Elle nuance beaucoup ses mouvements, ce qui donne des qualités différentes. Quant à Lantratov, c’est impeccable. Que j’ai hâte de voir Vasiliev dans ce pas de deux qui va forcément en rajouter des tonnes (pour le plaisir du public) ! Lantratov montre une aisance technique, avec une belle amplitude et des retombées impeccables. Le couple fait monter la sauce assez vite et enfin la salle s’enthousiasme ! Ouf il était temps de faire un accueil convenable à cette compagnie.
Un dernier pas de deux entre Jérôme et Adeline très beau, avec des transferts de poids du corps de l’un vers l’autre, des portés assez intéressants. L’adage est joli, sort du vacarme de la révolution pour mieux nous y replonger ensuite, quand Adeline décide de rejoindre son père sur l’échafaud. La guillotine fait tomber la tête d’Adeline, recueillie dans les bras de Jérôme qui se lamente, tandis que les révolutionnaires continuent leur marche sur Paris, Jeanne et Philippe en tête.
En résumé, une très bonne soirée, un ballet qui a ses faiblesses chorégraphiques, mais un vrai divertissement, plein de réjouissances. Le ballet ne peut être dansé que par une compagnie comme le Bolchoï, de part son côté exubérant. Je retourne voir Vasi/Osi dans Flammes le 15 mai, j’ai hâte de voir ce que ça donne. Je ressors très impressionnée par la danse des Russes, que je trouve généreuse, et très communicative. Il y a une âme dans cette danse qui donne des émotions très particulières.
Merci encore à JMC pour la place de gala.
Boris Asafiev
Musique
Alexei Ratmansky
Chorégraphie
D’après Vasily Vainonen
Ilya Utkin, Evgeny Monakhov
Décors
Yelena Markovskaya
Costumes
Damir Ismagilov
Lumières
Distribution du 05 mai 2011 19h30
Jeanne, fille de Gaspard et de Lucille : Maria Alexandrova
Jérôme, son frère : Denis Savin
Philippe, un Marseillais : Vladislav Lantratov
Le marquis Costa de Beauregard : Iouri Klevstov
Adeline, sa fille : Anna Rebetskaya
Mireille de Poitiers, une actrice : Nina Kaptsova
Antoine Mistral, un acteur : Artem Ovcharenko
Jarcasse, une vieille femme : Yuliana Malkhasyants
Gilbert, le capitaine des Marseillais : Alexandr Vodopetov
Le roi Louis XVI : Ruslan Skvortsov
La reine Marie-Antoinette : Olga Suvorova
Gaspard, un paysan : Alexandr Petukhov
Lucille, sa femme : Natalia Novikova
Amour : Anastasia Stashkevich
L’apparition de la fiancée : Olga Kishneva
Les amies d’Arminde : Yulia Grebenshchikova, Olga Marchenkova, Maria Zharkova, Angelina Vlashinets.
Les furies : Anastasia Meskova, Victoria Osipova, Victoria Litvinova, Anna Tikhomirova, Anna Okuneva, Anna Leonova.
Des chasseurs, amis du marquis : Batyr Annadurdyev, Yan Godovsky, Maxim Surov, Igor Tsvirko
Danse auvergnate : Anna Antropova, Krisitina Karaseva, Alexandr Vodopetov, Alexeï Kostin.
Danse marseillaise : Alexeï Matratov, Dmitry Zagrebin, Igor Tsvirko
Le président de la Convention : Alexandr Fadeechev
La sortie ballet de la semaine : Roméo et Juliette de Noureev
C’est à partir du 11 avril jusqu’au 30 avril. J’ai vu la séance de travail vendredi (compte rendu bientôt).
C’est un ballet absolument sublime qu’il ne faut pas manquer ! Allez il fait beau vous pouvez faire la queue pour avoir des places à 5€, d’autant que bientôt ces places n’existeront plus.
La distribution de la semaine : Le Bolshoï à Paris
Elles n’arrêtent pas de changer sur le site du Bolshoï mais voilà les dernières tombées.
Flammes de Paris (rôles dans l’ordre : Jeanne, Phillipe, Adeline, Jérôme, Mireille de Poitiers Antoine Mistral)
Alexandrova/Lantratov/Rebetskaïa/Savin/Krysanova/Skvortsov le 5 mai
Osipova/Vasiliev/Kaptsova/Lopatin/Shipulina/Skvortsov le 6 mai
Alexandrova/Volchkov/Nikulina/Merkuriev/Kaptsova/Ovcharenko le 7 mai
Alexandrova/Lantratov/Kaptsova/Savin/Krysanova/Skvortsov le 11 mai
Osipova/Vasiliev/Rebetskaïa/Lopatin/Kaptsova/Ovcharenko le 15 mai
Don Quichotte(rôles dans l’ordre : Kitri, Basilio, La danseuse des rues, La reine des Dryades, Don Quichotte, Sancho Pança)
Ossipova/Vassiliev/Leonova/Shipulina/Loparevitch/Petukhov le 10 mai
Shipulina/Volchlov/Okuneva/Nikulina/Loparevitch/Petukhov le 12 mai
Ossipova/Vassiliev/Meskova/Shipulina/Loparevitch/Petukhov le 13 mai
Krysanova/Lopatin/Okuneva/Nikulina/Loparevitch/Petukhov le 14 mai à 14h30
Alexandrova/Volchkov/Leonova/Shipulina/Loparevitch/Petukhov le 14 mai à 20h.
Pour le moment j’y vais le 5, le 6 et le 15 mai pour Flammes de Paris. J’ai une place pour le 12 mai pour Don Quichotte, je ne peux m’y rendre car j’ai une répétition, donc si quelqu’un veut bien me l’échanger.. C’est une catégorie trois très bien placée.
La bonne action de la semaine : vente de chaussons étoilés pour le Japon
L’action est lancée par José Martinez, au passage lisez l’interview qu’il a donnée dans El Pais. Je cite donc son appel : « Projet récolter des pointes/demi-pointes de solistes de
grandes compagnies, usagées et surtout dédicacées… une vente sera organisée au Japon afin de récolter des fonds… je fais le lien, à,moi tous les chaussons usés! »
Les chaussons sont donc à envoyer à l’Opéra de Paris, à l’attention de José Martinez, au 8 rue Scribe 75009.
Le shopping de la semaine : Repetto
La nouvelle boutique dans le marais ouvrira ses portes vendredi 18 avril à 10h30 et on y annonce des surprises. La façade recouverte de pointes (taille 32 ou 34 rien à regretter..) en était déjà une belle.
La vidéo de la semaine : Sarah Kora Dayanova dans le Lac des cygnes
Actuellement blessée, et je lui souhaite un excellent rétablissement car j’espère bien la voir dans les rôle de Rosaline et Lady Capulet dans Roméo et Juliette. Voilà la belle Kora, ça
donne ça, pas mal non? Je la trouve rayonnante.
Cette semaine le petit rat sera à Marseille, qui sait, trouvera bien un spectacle à aller voir. Pour ceux qui ont des vacances j’espère qu’elles seront bonnes et ensoleillées, et pour les autres courage!