Les 3 et 6 décembre ont lieu le concours de promotion interne du ballet de l’Opéra de Paris. Cette année le jury était présidé par Stéphane Lissner. Il était composé de Benjamin Millepied (directeur de la danse), Clotilde Vayer (maître de ballet associée à la direction), Maria Kochetkova (Principal au San Franscico Ballet),Ethan Stiefel (Principal au NYCBallet à l’ABT), Lionel Delanoë (maître de ballet), Aurélie Dupont (danseuse étoile), Benjamin Pech (danseur étoile), Aurélia Bellet (sujet), Myriam Kamionka (sujet), Alexandre Carniato (quadrille) et Juliette Gernez (coryphée). Retour sur le concours femmes. La chronique ne reflète que mon avis tout personnel. Si vous décidez de laisser un commentaire, le concours étant toujours un sujet « bouillant » et objet de controverse, merci de rester cordial.
- Quadrilles 10h30
Nombre de postes à pourvoir : 5
Sont promues : 1. Ida Viikenkoski 2. Jennifer Vissocchi
Variation imposée : Le Lac des cygnes, Acte I, Pas de trois, 1ère variation, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa. En vidéo, clic (à 2’51)
Variations libres
Amélie Joannidès, Le Corsaire, variation lente, Marius Petipa
Lucie Mateci, L’histoire de Manon, Acte II, variation de Manon, Kenneth Mac Millan
Sophie Mayoux, The Four Seasons, variation de l’Automne, Jerome Robbins
Caroline Osmont, Don Quichotte, Acte I 1ère variation de Kitri, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa
Ninon Raux, Emeraudes/Joyaux, 1ère variation, George Balanchine
Roxane Stojanov, Paquita, variation de Paquita, d’après Marius Petipa
Gwenaëlle Vauthier, Giselle, Acte I, Variation de Giselle, Mats Ek
Ida Viikinkoski, The Four Seasons, variation du printemps, Jerome Robbins
Jennifer Visocchi, Grand Pas, Twila Tharp
Laura Bachman, Giselle, Acte I, Variation de Giselle, d’après Marius Petipa
Alice Cantonnet, Grand Pas classique, Victor Gsovsky
Julia Cogan, Don Quichotte, Acte II scène de la vision, variation de Dulcinée, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa
Camille de Bellefon, Arepo, Maurice Béjart
Emma d’Humières, The Four Seasons, variation du printemps, Jerome Robbins
Leïla Dilac, Dances at the gathering, la danseuse en vert, Jerome Robbins
Lucie Fenwick, In the Middle, somewhat elevated, William Forsythe
Claire Gandolfi, Raymonda, Acte II, variation d’Henriette, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa
Clémence Gross, Paquita, variation de Paquita, d’après Marius Petipa
Mes impressions : Il fallait d’abord ne pas lâcher son attention dans cette série pour découvrir ces jeunes femmes et ne pas passer à côté d’une. Au final, beaucoup d’efforts pour 2 jeunes artistes récompensées. La variation imposée semblait au niveau des quadrilles et pourtant, nombreuses sont celles qui ont vacillé dans la diagonale finale. Il fallait jouer de son haut du buste tout en restant très solide dans les chevilles pour tenir la variation jusqu’au bout. A ce jeu-là, Amélie Joannidès tire son épingle du jeu. Elle est à la fois pétillante et très appliquée et termine la variation avec un brillant équilibre. Ninon Raux est sans doute la plus musicale de sa classe, et, à l’instar de sa collègue, elle a tenu son arabesque avec brio. Ida Viikinkoski est charmante et montre aussi de la solidité dans l’équilibre tout comme Gwenaëlle Vauthier. Jennifer Visocchi signe une très belle variation et se distingue par son style et sa maturité artistique. La palme de l’élégance revient à Alice Catonnet, qui illumine la scène de sa grâce : son port de tête et ses bras font d’elle une très belle danseuse. Les filles se succèdent et on tremble à la descente de la diagonale. Il faut donc attendre les variations libres pour confirmer ou infirmer des intuitions.
Amélie Joannidès n’a pas démérité pendant sa variation libre, malgré quelques fouettés un peu fragiles. Jennifer Visocchi est la perle de la série : elle danse brillamment son Grand Pas et redonne le sourire à toute l’audience. Caroline Osmont passe un peu à côté de son personnage, tout comme Lucie Mateci. Les variations « sans personnage » m’ont semblé dans l’ensemble plus réussies. Sophie Mayoux montre toute sa personnalité dans sa variation de l’Automne, j’ai beaucoup aimé son interprétation. Ida Viikinkoski danse le printemps avec un brin de romantisme, ce qui n’est pas pour me déplaire.
Dans l’ensemble, la classe des quadrilles a semblé assez homogène, et seuls deux postes ont été pourvu. On regrette qu’ Amélie Joannidès ou encore Gwenaëlle Vauthier (très belle Giselle de Mats Ek) ne soient pas montées, d’autant que l’enjeu de quadrilles à coryphées n’est pas le même que pour la classe des sujets. Aussi il est étrange que le jury n’ait pas réussi à se mettre d’accord sur ce point.
- Coryphées 13h00
Nombre de postes : 2
Sont promues : 1. Léonore Baulac 2. Hannah O’Neill (3. Letizia Galloni 4. Laurène Lévy 5. Fanny Gorse 6. Marion Barbeau).
Variation imposée : La Bayadère, Acte II, variation de Gamzatti, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa. En vidéo, clic
Variations libres :
Laurène Lévy, In the Middle, somewhat elevated, William Forsythe
Hannah O’Neill, La nuit de Walpurgis, George Balanchine
Aubane Philbert, La Bayadère, Acte II, variation de Nikiya, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa
Charlotte Ranson, Apollon, Variation de Polymnie, George Balanchine
Marion Barbeau, Bhakti III, Maurice Béjart
Léonore Baulac, The Four Seasons, variation du printemps, Jerome Robbins
Laure-Adélaïde Boucaud, Le Sacre du Printemps, variation de l’Elue, Maurice Béjart
Letizia Galloni, Tchaïkovski pas de deux, George Balanchine
Fanny Gorse, Dances at the gathering, la danseuse en vert, Jerome Robbins
Emilie Hasboun, The Four Seasons, variation de l’Automne, Jerome Robbins
Juliette Hilaire, Raymonda, Acte III, variation de Raymonda, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa
Mes impressions : Peu de suspense dans cette classe, comme si tout était un peu joué d’avance. Bien sûr Léonore Baulac fut sublime dans ces deux variations et je n’ai rien à redire de sa promotion. La variation de Gamzatti a posé quelques soucis à la classe des coryphées à un endroit où l’on pourrait penser que c’est un passage facile et pourtant. Il s’agit du manège du milieu, où il faut enchaîner tour en dedans, puis en dehors avec les petites menées. C’est un passage où les chevilles sont à rude épreuve et la salle a cru plusieurs fois voir les jolies chevilles des candidates y passer. Hannah O’Neill ouvre le bal des couacs de chevilles, puis Marion Barbeau, Emilie Hasboun et Juliette Hilaire, qui s’est bien déséquilibrée. Laurène Lévy a maîtrisé la variation, tout comme Léonore Baulac ou encore Aubane Philbert (les tours attitudes ! superbes !). Letizia Galloni dont j’apprécie le style, a elle aussi été une belle Gamzatti.
Dans les variations libres, Laurène Lévy a choisi Forsythe, qui lui va très bien et dont elle a dansé le passage d’In The middle avec du style et une vraie personnalité. Hannah O’Neill montre qu’elle en a sous le pied avec sa variation de Balanchine et efface le petit accroc de Gamzatti. Aubane Philbert avait fait le choix d’un 100% Bayadère, et affirme son engagement artistique. Marion Barbeau se débrouille bien avec son Bhakti III, tout comme Fanny Gorse qui est une très belle danseuse en vert. Dans l’ensemble, toutes les variations libres se passent bien et c’est bien un choix de personnalité que le jury a du faire. A l’évidence Léonore Baulac en est une, tout comme Hannah O’Neill, mais si j’ai eu un pincement au coeur pour Laurène Lévy, car j’ai trouvé qu’elle était au-dessus, en terme de maturité sur scène.
- Sujets 15h00
Nombre de poste à pourvoir : 1
Est promue : Laura Hecquet (2. Héloïse Bourdon 3. Sae Eun Park 4. Caroline Robert 5. Marine Ganio 6. Charline Giezendanner).
Variation imposée : Le Lac des cygnes, Acte III, variation du cygne noir, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa. En vidéo, clic.
Variations libres :
Sae Eun Park, La Bayadère, Acte II, variation de Nikiya, Rudolf Noureev d’après Marius Petipa
Caroline Robert, Other Dances, 2ème variation, Jerome Robbins
Héloïse Bourdon, Les Mirages, variation de l’Ombre, Serge Lifar
Marine Ganio, Other Dances, 1ère variation, Jerome Robbins
Charline Giezendanner, Clavigo, variation de Marie, Roland Petit
Laura Hecquet, The Four Seasons, variation de l’Automne, Jerome Robbins
Mes impressions : Je pensais que le concours était plié et que Sae Eun Park passerait quoiqu’il arrive. Comme quoi, il est bon parfois de se tromper et le concours sert aussi à rebattre les cartes. La variation du cygne noir n’a pas posé beaucoup de problème aux candidates, tout juste quelques piétinements de Caroline Robert et de Charline Giezendanner lors des réceptions. Côté interprétation, il faut saluer Héloïse Bourdon, que j’ai tendance à trouver trop sage et qui là était furieusement juste. Je n’ai pas quitté son regard de mes jumelles. Sae Eun Park signe sans doute la variation la mieux dansée d’un point de vue technique mais passe à côté du personnage d’Odile. Laura Hecquet propose quant à elle un cygne tout en élégance, avec de très beaux ports de bras. A ce stade, je trouve qu’Héloïse Bourdon est la plus proche du poste de première danseuse. Place aux variations libres qui vont nous faire passer un excellent moment. C’est Sae Eun Park qui ouvre le bal et qui là, montre qu’elle a aussi, au delà de ses compétences techniques, un vrai sens de la dramaturgie. Variation de Nikiya impeccable. J’ai beaucoup aimé la variation de Marine Ganio dans Other Dances, très vive et élégante. Charline Giezendanner est toute à son aise dans la variation de Marie. Héloïse Bourdon a choisi de reprendre Les Mirages qu’elle avait déjà dansé en concours : c’était bien, mais je n’accroche pas à cette variation qui a tendance à m’ennuyer. Laura Hecquet fut lumineuse dans sa variation de l’Automne et on comprend pourquoi elle a été promue. Une place de première danseuse bien méritée pour une artiste qui rayonne depuis des années sur scène.
Bravo à toutes les artistes et félicitations aux promues !