Guillaume Debut

Out of stage project : rencontre avec Deyan Parouchev

Depuis une semaine, Deyan Parouchev a accroché quelques-unes de ses photos issues de Out of Stage Project, au Café Craft, situé au 24 rue des vinaigriers à Paris. L’occasion pour moi, de revenir avec lui, sur la génèse de ce projet et son avenir. Rencontre avec le photographe autour d’un délicieux café.

 Affiche expo Out of Stage Project Craft

Qui êtes-vous Deyan Parouchev ?

Je suis né en Bulgarie, je suis arrivé en France en 1991. Je viens d’une famille d’artistes, peintres et plasticiens, assez connus en Bulgarie. Je garde contact avec mon pays d’origine, j’y passe un quart de l’année, car je suis le fondateur d’une fondation d’art contemporain qui porte le nom de mon père. (Yordan Parushev Foundation)

J’ai fait une école de communication visuelle, j’ai ensuite travaillé dans la post-production vidéo et j’ai commencé la photo, comme un loisir, puis en 2008, avec le développement du numérique, il fallait que je ne fasse plus que cela. Je prenais tout en photo, je voulais fixer les instants. Je vis parfois dans l’angoisse du temps qui file et la photographie est un moyen de figer un instant qui ne se répètera plus. C’est un peu comme mes mémoires. Depuis tout petit, j’avais déjà dans mes mains un appareil photo Canon, cela a du rester dans mon inconscient. J’ai compris vite que c’était mon truc de photographier les visages humains. Pour moi, ce sont des paysages infinis.

Vous êtes aussi très intéressé par le travail vidéo ?

La vidéo c’est 24 photos en 1 seconde ! Pour moi, c’est le même travail. Mon premier film est d’ailleurs un film en Time Lapse. Je suis un grand cinéphile, mais cela va de pair avec la photographie. La photographie c’est plus mystérieux, il faut plus faire travailler son imagination.

A Bordeaux

Comment avez-vous découvert la danse ?

J’ai eu l’occasion plusieurs fois d’être cadreur à l’Opéra de Paris. J’ai pu rencontrer des danseurs, me familiariser avec ce monde merveilleux. J’ai vu beaucoup de spectacles. C’est un art que j’aime vraiment, par son mouvement, ses histoires. Les corps transmettent des émotions sans parler. Cela touche directement le spectateur car c’est le corps qui parle.

Comment a commencé le projet ?

C’est un accident ! J’étais en shooting de mode à Sofia. J’ai un ami qui passe sur le lieu de prise de vue avec une amie à lui, gymnaste. Pendant la pause, elle me demande de lui faire quelques photos. Il y avait un mur avec un X peint en blanc sur le mur. Elle a commencé à bouger, puis a fait un saut qui reprenait cette forme. Au départ, je n’ai pas prêté attention à cette image, j’ai même failli l’effacer ! Et puis, je l’ai transformé en noir et blanc et je me suis rendu compte qu’elle avait beaucoup de force. J’ai trouvé intéressant d’avoir quelque chose de très gracieux dans un décor disgracieux. J’ai aimé ce contraste.

Prise de vue Sofia

Les photos exposées ici, présentent en effet, de très beaux danseurs, de l’Opéra de Paris, de Bordeaux ou d’ailleurs, dans des décors urbains. Racontez-nous la suite.

Je me suis plongé dans les livres de photographies de danse. Mais je n’ai pas trouvé ce que je cherchais. De belles photos de scène, mais rien d’autre. C’est là que j’ai fait le lien avec la photographie du shooting de Sofia. J’ai contacté Allister Madin, il avait un peu de temps. On a improvisé cette série avec le parapluie. J’ai mis mon flash dedans. Il a trouvé ça génial. Alors il a appelé Sarah Kora Dayanova et nous étions partis pour une nouvelle série. Le lendemain, nous avons enchaîné avec troisième shooting sur les toits de Paris, avec Claire Gandolfi. Aujourd’hui, j’en suis à plus de 15 shooting différents, un peu partout en Europe. J’en ai fait à Bordeaux, en Hollande, en Bulgarie bien sûr. Je les ai traînés partout, dans des usines désafectées, des le moteur d’un bateau, dans le siège abandonné du Parti communiste Bulgare. J’encore plein d’idées pour les prochains ! Je veux aussi réaliser un petit film en 2015 qui complèterait ce projet.

L’esthétique des photos est très particulière. Toutes en noir et blanc, avec une atmosphère qu’on retrouve dans chaque cliché. Pouvez-vous nous expliquer cela ?

J’ai fait beaucoup de photographies de mode et de publicité. C’est la lumière des photos de mode que l’on retrouve dans le projet Out of stage ; une lumière très dirigée, très contrastée, hyper léchée. Ce n’est pas une lumière que l’on voit dans la danse en général, surtout que là on est dehors, on n’est pas dans un studio photo. Cela donne un aspect une petit peu étrange, une atmosphère particulière. Le challenge c’est d’amener les danseurs dehors et de sublimer leurs corps avec une lumière mélangée entre la lumière du jour et la lumière de studio.

Les photos sont en noir et blanc pour donner une espèce d’intemporalité. Je n’ai pas envie que l’on puisse dater ces photos. Il n’y a rien dans les photos qui puisse te renvoyer à une époque. Le noir et blanc permet aussi d’unifier les photos les unes par rapport aux autres. Elles sont toutes très contrastées. D’autre part, comme les lieux sont tous très différents, on se perdrait un peu. L’œil est plus réceptif au noir et blanc, et cela permet une lecture de l’image plus facile. J’ai essayé de proposer une esthétique assez universelle, qui peut toucher un large public. Je fais ces photos là pour cela, pour qu’elles rencontrent un public.

Les photos de Deyan Parouchev sont visibles au Café Craft jusqu’en mi-février. Pour plus d’infos, la page Facebook du projet, le site de Deyan Parouchev, et le site du café Craft.