Sylvie Guillem 6000 miles away

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Il est des monstres de la danse qu’on voudrait immortels. Parmi eux, il y a évidemment Sylvie Guillem. Parce que même immobile, elle vous capte, elle vous raconte une histoire
avec une respiration, elle vous touche quelque part où d’autres peinent à entrer.

 Il est aussi des chorégraphies qui siéent particulièrement à certains artistes. Parmi mes amis et des lecteurs de ce blog, certains connaissent mon amour pour les chaussures.
Quand une paire va parfaitement à vos pieds, avec toutes les tenues, elle reste en permanence dans mon couloir. Elles sont comme une seconde peau, je ne peux plus m’en séparer. Les chorégraphies sont comme une seconde peau pour Guillem. Un langage qui lui va parfaitement. Son corps est au service de ces chorégraphies  et on passe une soirée rare.

 La première pièce de Forsythe fut comme un rêve flou, dans lequel on trace des lignes. Un carré de lumière sur les deux interprètes, Guillem et Massumaru. Un
musique presque sourde, qui semble suivre les interprètes. On retrouve un langage très dessiné mais sans être raide. C’est une danse fluide, où les danseurs semblent détachés de la scène. Ils sont un objet en mouvement, que l’on observe par intermittence. En effet, le duo danse entre des noirs où tout se coupe. A chaque réveil, de nouveau ces tracés avec les bras. Des cercles rencontrent les lignes des jambes. C’est très géométrique, mais cela se mêle à une certaine poésie de l’expression du corps.

La deuxième pièce fut celle que j’ai préféré chorégraphiquement. On ne se refait pas, et le langage de Kylian est celui qui me touche profondément. Scénographiquement, c’est très élégant. On joue avec le tapis de scène, on explore la relation à cette seconde peau, on s’enroule dedans, on disparaît dessous. L’espace est sans cesse bousculé, reconstruit. Les lumières rasantes découpent la scène en plusieurs espaces pour danser. Les lumières douces mettent en valeur les mouvements. Kylian joue une fois de plus la carte
de la nudité sans jamais être vulgaire. Le vêtement n’est que le prolongement de la peau. Il parvient dans les mouvements à faire oublier la nudité, là où, ailleurs, elle dérangerait
probablement. Très joli duo, j’ai complètement adhéré à cette pièce.

Guillem revient sur la scène avec Bye de Mats Ek. Petit bonbon pétillant qui vous donne un grand sourire, Bye est comme ces histoires courtes qu’on vous raconte et qui vous procure une grande joie. Tout le talent de Guillem ressort dans cette chorégraphie poétique. L’histoire d’une femme, qui part en voyage, qui revient. Au milieu du
décor composé juste d’un panneau, sur lequel on projette des images, ou bien dans lequel on peut entrer, se faire numériser, Guillem danse. Ouvrant son âme au public le temps de cette pièce, elle livre un spectacle touchant, qui vous captive. Son visage est un masque qui se transforme à loisirs. Son corps me fascine totalement, cette danseuse est un ovni qu’il faut voir danser. On ne peut se lasser de voir ces jambes s’étirer à l’infini, ces pieds qui à eux seuls peuvent faire une chorégraphie.

Rearray – création en France
William Forsythe  chorégraphie, costumes & conception lumières
David Morrow  musique
Rachel Shipp  réalisation lumières
Duo interprété par Sylvie Guillem et Massimo Murru (17 et 21 mars), danseur Etoile du Théâtre de la Scala.

27’52’’
Jiří Kylián chorégraphie & décors
Dirk Haubrich musique
Joke Visser costumes
Kees Tjebbes lumières
Duo interprété par Aurélie Cayla et Lukas Timulak

Bye – création en France
Mats Ek chorégraphie
Beethoven (sonate pour piano op. 111, enregistrement interprété par Ivo Pogorelich)  musique
Katrin Brännström décors & costumes
Erik Berglund  lumières
Coproduit par Dansens Hus Stockholm
Solo interprété par Sylvie Guillem

 

Musique enregistrée

 

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