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Bonjour à tous,
Je suis Pauline, j’ai 32 ans, et j’ai dû arrêter la danse après une courte carrière et un tout début d’enseignement de la danse; J’ai écrit un texte que j’avais envie de partager, il n’est pas très gai mais le but est de vous dire de profiter de danser tant que vous le pouvez car c’est une chance extraordinaire que l’on ne mesure pas toujours!
Je me trouve face à une vérité contre laquelle je lutte depuis trop longtemps.
Je ne peux plus danser ; je ne danse plus.
Je ne serai plus la Pauline que j’avais construite au fil des années, essayant malgré les obstacles de sculpter et façonner… une danseuse. Pour atteindre mon rêve, celui autour duquel je grandissais comme le lierre sur les murs de ma maison.
Le verdict est tombé il y a huit ans déjà. Huit ans et je n’ai toujours pas pu envisager de regarder la réalité dans les yeux .
Lorsque je formule en moi cette absurdité : « tu ne peux plus danser » , et dès lors qu’elle s’approche un peu de mon esprit ; c’est un gouffre qui s’ouvre devant moi.
J’avais déjà entendu cette expression, avec le gouffre. Mais avant ce jour où un médecin a prononcé les mots fatidiques, j’ignorais qu’on pouvait la vivre. Je ne savais pas que le gouffre était bien réel, ni qu’il était si vertigineux. Tellement qu’il semblait aspirer tout ceux qui se trouvaient au bord.
Les mots prononcés par ce docteur « arrêter la danse et trouver un autre « passe-temps », si violents, si inconcevables ont voulu me propulser à l’intérieur de ce gigantesque vide, et m’y faire disparaître.
Alors un instinct plus profond que mes entrailles m’a immédiatement sorti de là, m’accrochant à la chaise où je me trouvais, et faisant en même temps s’évanouir les mots coupables de ce cauchemar.
J’ai continué à danser comme si rien ne s’était passé. J’ai vu d’autres médecins, et j’ai compris que je devais choisir : danser au risque d’avoir une mobilité réduite pour la marche dans un futur assez proche, ou préserver mes chevilles pour avoir une chance de pouvoir un jour faire la course avec mes enfants ou tout simplement courir pour attraper un bus. Évidemment j’ai dansé tant que j’ai pu.
Aujourd’hui, après 2 opérations, j’ai besoin d’une béquille pour me tenir debout plus de 3 minutes sans trop souffrir. Si je saute ou que je cours je marche très difficilement pendant plusieurs jours.
Malgré ces faits concrets, mon cerveau n’imprime pas. Apparemment il convient de dire que je n’ai pas « fait mon deuil » .
Et pour cause : on fait le deuil de quelque chose qui est mort, qui ne sera plus.
Je ne vois pas comment je pourrais concevoir la danse comme cela, comme étant « morte ». Elle est en moi, alors il faudrait que je considère mon corps comme mort, dans ce cas.
Je n’étais que danse. Je l’ai découverte à 7 ans et adoptée pour de bon à 10 ans. Depuis elle était ma respiration, disons qu’elle constituait mes racines et mon tronc. La danse classique exige que chaque partie du corps soit placée selon une esthétique et un ressenti précis, si subtil soit-il. Alors quand elle vous prend elle devient tout ; A chaque seconde, chaque jour de chaque année, elle vous comble, vous nourrit… Je crois qu ‘elle me sauvait la vie, et de la vie aussi.
Elle embellissait les plus petites choses, semant son bonheur au fur et à mesure que je que je travaillais pour elle. Je lui ai tant donné, des centaines, peut-être des milliers d’heures à répéter les mêmes gestes, les siens, les plus beaux du monde. Tant de sueur, d’efforts, de joie et de passion !
J’ai la certitude que j’étais née pour ça tant je me sentais vivante lorsque je dansais. C’est là que j’étais moi. Alors, qui serais-je si je la perdais ?
Il me semble que je ne serai plus grande chose. Que tout ne serait jamais plus qu’une vague consolation, qu’il n’y aurait que de maigres raisons de se lever chaque jour.