Plus de 30 minutes d’applaudissements pour l’étoile Isabelle Ciaravola qui faisait ses adieux à la scène de Garnier. Après deux heures de spectacle, dans le rôle de Tatiana, l’étoile a dit au revoir à son public dans une émotion toute particulière.
La soirée fut superbe. A la hauteur de l’étoile. Le ballet est passé trop vite. On aurait aimé que le plaisir dure plus longtemps, bien qu’on ne fut pas en reste d’émotions et de sensations fortes. C’est bien là le talent d’Isabelle Ciaravola. Elle est une grande tragédienne qui incarne à merveille les héroïnes qu’elle choisit. De son visage, elle sait tout faire – transmettre les sentiments du personnage qui vit à travers elle. Pour le reste, ses superbes jambes font le travail, avec une élégance naturelle.
C’est dans ce ballet qu’elle a été nommée étoile le 16 avril 2009. Un rôle qui lui colle à la peau. Et quand on la voit danser, on le comprend. De la femme enfant à la femme mûre, il y a un gouffre. Isabelle Ciaravola parvient à nous montrer le personnage de Tatiana comme personne. Jeune fille férue de littérature, qui tombe amoureuse comme dans un roman, elle campe une Tatiana naïve, presque chétive face à cet Onéguine hautain qui la méprise. Hervé Moreau sert son jeu avec beaucoup de talent – la narration est lisible, on suit cette histoire comme dans un livre. Au troisième acte, on voit avec clarté cette femme mûre, rangée auprès de son mari. Elle repousse Onéguine avec une douleur qui nous prend aux tripes. Contre son amour, elle choisit la raison, dans la souffrance. Elle nous captive, elle nous emmène et nous raconte ce personnage de Tatiana. Fascinante, on ose à peine décoller les yeux de son visage, si expressif et si juste, qui nous dit tant des sentiments et des interrogations de Tatiana. Jamais lisse, elle fait de cette héroïne, un personnage complexe, qui ne se contente de pas de danser avec brio, mais qui livre un combat des sentiments face à l’orgueilleux Onéguine. On ne saurait retenir ses larmes à la dernière scène, la tension est elle qu’elle nous saisit. On est accroché au visage de Tatiana, au moindre de ses gestes. Sa chute au sol est le point d’honneur de la pièce. On en reste quelques secondes abasourdi.
Tous les danseurs se sont mis au service de cette représentation exceptionnelle. Charline Giezendanner était pétillante et superbe dans son rôle d’Olga. Mutine, jeu de jambes impeccable, son partenariat avec Mathias Heymann était parfait. Ce dernier a encore livré une prestation incroyable. Sa variation du deuxième acte était un régal – pirouettes qui n’en finissent pas avec de beaux ralentis pour laisser passer l’émotion de Lenski. La danse est fluide tout au long du ballet, tout comme l’archet du violon qui glisse sur les cordes. « Les jambes de l’Opéra » – tel est le surnom d’Isabelle Ciaravola – sont l’apothéose de cette soirée très réussie.
La soirée se termine dans le Grand Foyer, où Isabelle Ciaravola y entre radieuse. Un discours court où elle remercie les princes qui l’entourent : Mathieu Ganio, Hervé Moreau, Karl Paquette. Des partenaires qui devront faire sans elle, mais qui l’ont tant fait briller… de vrais princes autour d’une diva de la danse.
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