L.A. Dance Project de Benjamin Millepied

De passage pour quelques jours à la capitale, Benjamin Millepied a eu l’occasion de montrer sa jeune compagnie, ses créations ainsi que ses choix de répertoire. L’occasion pour le public de fantasmer sur son travail futur à l’Opéra de Paris. Ne faisons pas un bond en avant dans le temps et revenons sur la soirée du 24 mai.

La soirée s’ouvrait avec Reflections une pièce de Benjamin Millepied pour 5 danseurs. Si les quinze premières minutes ne sont pas désagréables, on tombe assez rapidement dans l’ennui. Certes, on sent bien les formes et les matières que le chorégraphe a voulu explorer. De là à le faire pendant 40 minutes, on en a perdu de l’émotion en route. Il nous perd dans des courses qui n’en finissent pas. Quand le panneau GO apparaît, (mais pourquoi cette scénographie ????) on aurait presque envie d’obéir et de quitter la salle. On se rappelle alors qu’après il y a un Cunningham et le merveilleux Quintett de Forsythe, qu’on ne manquerait sous aucun prétexte. On se met donc, nous aussi spectateur à explorer et décortiquer les intentions, les effets, à défaut que cela ne provoque un quelconque effet en nous. La pièce permet d’observer les cinq danseurs, très beaux, à la technique assez remarquable.

 

Reflections (c) Marie-Noëlle Robert

 

D’autres spectateurs ont sans doute eu le même besoin que moi de quitter la salle pendant le Cunningham. Je reconnais qu’au delà du 10 rang, on ne devait pas distinguer grand chose de cette pièce qui n’est éclairée que par des phares de voitures et quelques lampes torches de mauvaise qualité. Rajoutez à cela des bruits urbains en guise de musique, certains spectateurs s’agitaient drôlement sur leurs fauteuils. Pourtant, la chorégraphie de la pièce est absolument captivante et si on ne la lâche pas, elle devient obsédante, comme souvent chez Cunningham. La danse fait sens presque à elle seule, dans un enchaînement de pas très dessinés dans un espace qui brouille le regard du spectateur. Les traits noirs dessinés dans l’espace par les corps deviennent lumineux. Ils chutent au sol de façon successive, se relèvent à chaque fois d’une façon qui semble différent. Le tout crée une mélodie chorégraphique très mélodieuse en opposition à la musique si cacophonique.

winterbranch (c) Ryan Schude

Le bijou de la soirée reste Quintett remarquablement exécuté par les cinq danseurs de la compagnie. La pièce est une succession de solos, duos, trios sur la très obsedante musique de Gavin Bryars. La délicatesse des portés, les pas à la fois virtuoses dans leur exécution et si dans leur intention, tout concorde à mener le public vers l’attendrissement et l’émotion. Si la pièce a été créée suite à un décès, elle évoque de multiples sentiments ; la peur, le doute, la fragilité humaine mais aussi l’espoir. On ne ressent jamais la fatalité car tout est calme il n’y a rien de précipité. Les interprètes affichent toujours un sourire serein.

Quintett (c) Marie-Noële Robert

Une belle compagnie, des choix de pièces pertinents, Benjamin Millepied pose le décor pour sa future venue à la tête de l’Opéra de Paris. Espérons que le public lui laisse du temps pour mettre en place des choses intéressantes comme celles qu’on a vues ce soir.

Représentation du vendredi 24 mai 2013, avec Charlie Hodges, Nathan B. Makolandra, Rachelle Rafailedes, Julia Eichten, Morgan Lugo.

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