Non ce n’est pas à l’ambassade, vite changer d’avenue pour se retrouver au 142 avenue des Champs Elysées, à la maison du Danemark pour assister à une conférence d’Erik Aschengreen, docteur ès
Lettres et historien de la danse. Conférence très intéressante que j’ai suivie avec E*** et Amélie et que je vous retranscrits.
Le ballet du Danemark est enfin de retour à Paris. Danser à Garnier, c’est revenir aux source, au berceau du ballet. La production que vous allez voir demain est une nouvelle production.
- Histoire du ballet royal du Danemark
A Copenhague, le premier maître fut un certain Galeotti en 1775. En 1771, l’école du ballet avait été fondée par Pierre Laurent, un danseur venu de l’Opéra de Paris. En 1726, un français, Jean
Baptiste Landet, qui avait un grand succès était parti à ST Pétersbourg fonder lui aussi une école. Les trois compagnies les plus anciennes ont été fondées par des Français :
- L’Opéra national de Paris en 1713
- L’Opéra de Saint Pétersbourg en 1738
- L’Opéra royal du Danemark en 1771
En 1816, Galeotti meurt. Cela avait été difficile pour lui de quitter la scène. A 77 ans, il se présentait toujours sur la scène. Pour contrer cela, le roi l’a nommé chevalier en 1812, les
chevaliers n’ayant pas le droit de se produire sur scène. Les ballets de Galeotti ont disparu sauf Les Caprices de Cupidon.
Les chemins entre la France et le Danemark n’ont jamais cessé de se croiser. En 1792, Antoine de Bournonville, père d’Auguste, arrive au Danemark. C’est un très beau danseur.
En 1805, nait Auguste de Bournonville, la même année qu’Andersen, qui aurait bien aimé être danseur, mais il avait de trop grands pieds. Il disait d’ailleurs qu’être danseur c’est « la carrière la
plus glorieuse du monde ».
Auguste de Bournonville a étudié à Paris de 1824 à 1830. Il a préféré retourner à Copenhague où il était premier danseur et directeur et où il pouvait tout décider. Il réglait les chorégraphies
comme il l’entendait. A l’époque, en Europe, des grandes ballerines conquérissaient les scènes. Bournonville ne voulait pas être « le porteur des dames ». Il était très estimé, très respecté
dans tout le royaume. Dans les autres pays, les danseurs étaient des marginaux, menaient des vies un peu particulières. Ce n’était pas le cas au Danemark, à Copenhague, ils étaient une sorte de
noblesse.
De 1830 à 1877, Bournonville est directeur du ballet. Il a crée une cinquantaine de ballets. Aujourd’hui on en danse encore une dizaine, comme La Sylphide, Napoli, Le Conservatoire.
Beaucoup de ses ballets se déroulent dans des pays étrangers. L’Italie est son pays préféré, car il est associé à l’art classique.
Pour Bournonville, le ballet est une façon de présenter sa conception de la vie. Il n’est pas absorbé par le mal du siècle, ni par le spleen. C’est un optimiste. Il est croyant. C’est pourquoi
dans ses ballets, souvent deux mondes s’opposent, le réel et le surnaturel. Les fins sont toujours heureuses et idylliques.
Bournonville n’est pas pour autant un naïf. Il avait beaucoup d’aventures quand il allait en France, avec beaucoup d’enfants, mais personne n’en savait rien au Danemark, cela aurait choqué.
Bournonville a eu de l’influence jusqu’en Russie. Il a eu un élève Johanson, qui est allé en Russie. Mais Bournonville n’aimait pas la danse russe qu’il trouvait trop acrobatique. En 1877, il se
retire de la scène. Il meurt en 1879. Suite à sa mort, l’école de Bournonville est crée. Vous pouvez retrouver un DVD avec toutes les barres de Bournonville ou bien vous pouvez aller faire le
stage annuel à Biarritz fin juillet.
A la fin du XIXème, Coppélia est importé. En 1932, Harald Lander devient le directeur du ballet. Il renouvelle le ballet. Il propose un enseignement plus moderne, pour pouvoir danser des
chorégraphes comme Fokine, ou Massine, mais aussi Le Lac ou La Belle. En 1952, il remonte son ballet Etudes à l’Opéra de Paris. Claude Bessy dit de lui qu’il avait « le
goût pour la précision » et Brigitte Lefèvre aime son exactitude et sa méthode. Il a permis de faire évoluer le style à l’Opéra de Paris.
Le danseur étoile de l’Opéra de Paris Flemming Flindt devient à son tour directeur du Ballet du Danemark en 1966. Il chorégraphie La Leçon d’après Ionesco qu’on a pu voir notamment à
l’Opéra Comique.
- Napoli de Nikolaj Hübbe
C’est une histoire romantique en trois actes. Au premier acte, les deux amants Teresina et Gennaro sont amoureux, jeunes et insouciants. Au deuxième acte, leur fidélité et leur courage sont mis
l’épreuve. Le troisième acte permet de retrouver la joie.
La nouvelle version n’est pas dans une mise en scène romantique. On est dans un nouveau contexte, celui des années 50. C’est un nouveau décor, inspiré des films de Fellini, Rossellini ou encore
Pasolini. Les personnages sont donc placés dans un autre contexte. On joue avec la tradition sans succomber sous son poids. La chorégraphie traditionnelle est réactualisée, notamment la pantomime
du premier acte. Nikolaj Hübbe a ajouté un pas de deux dans les deux premiers actes.
Au deuxième acte, c’est une nouvelle musique pour une nouvelle chorégraphie, plus sensuelle que celle de Bournonville. L’histoire devient existentielle. C’est un spectacle qui amuse et qui fait
rêver.
Visionnage de deux pas de deux : celui du deuxième acte où Golfo séduit Teresina, qui n’est pas une chorégraphie de Bournonville, car chez
Bournonville, on ne touche qu’avec les doigts. Ensuite un pas de deux extrait d’un Gala au Festival des Fleurs.
- Questions du public
Quelle est la musique du ballet ?
Les premier et troisième actes sont une composition danoise du 19ème siècle. Le deuxième acte est une musique de Louise Alénius Boserup.
Comment se sont transmis les ballets de Bournonville ?
Bournonville n’écrivait pas. Cela se transmet donc de génération en génération. En 1930, on a commencé à écirre. On a quelques sources iconographiques mais très peu. On a des photos des années
1850 et une vidéo de 1902.
Combien de danseurs il y a t-il dans le ballet? Et de quelle nationalités sont-ils?
Ils sont environ 90 et il viennent d’un peu partout. On n’a pas de Chinois. C’est devenu très mixte à partir des années 50.
Mais pour le style? Ne se perd-il pas?
Non, car on transmet ! On peut apprendre le style de Bournonville même si on n’est pas allé à l’école.
Savez-vous pourquoi Lander est parti de l’Opéra de Paris, après la 100ème représentation d’Etudes?
Oh il y a des secrets qu’on ne connait pas, mais Auric et lui ne s’entendaient pas.
Quel est le style de cette compagnie dès lors que son directeur vient de chez Balanchine ?
C’est un mélange. On joue avec la tradition, mais elle est aussi assurée. Dès lors qu’on a des vidéos, on peut remonter ce que l’on veut. Mais le deuxième acte de ce Napoli fait débat. C’est
intéressant.
Quel est l’âge de la retraite des danseurs et du directeur de la compagnie ?
Avant, un directeur restait toute sa vie à la tête d’une compagnie. Aujourd’hui après 10 ans, un directeur est usé (rires). Avant c’est 45/48 ans la retraite pour les danseurs. Aujourd’hui c’est
40/42 ans mais on garde certains une dizaine d’années de plus, pour faire des personnages. Il ont une pension à la suite de cela, mais pas suffisante pour vivre.
Edvard Helsted, Holger Simon Paulli, Hans Christian Lumbye | Musique |
Louise Alenius Boserup | Musique de l’acte II |
Sorella Englund, Nikolaj Hübbe | Chorégraphie et mise en scène d’après August Bournonville |
Maja Ravn | Décors et costumes |
Anton Liep | Création graphique |
Mikki Kunttu | Lumières |
Camilla Hübbe | Dramaturgie |