Озеро лебедей d’Ulyana Lopatkina

 

 

Lelacdescygnes


Cela n’a pas été facile d’obtenir le Saint Graal pour voir la jolie Russe. Tout d’abord je n’avais pas de place, et comme vous le savez, il n’y en avait plus du
tout. Beaucoup de distributions m’intéressaient et je ne m’étais pas focalisée sur l’étoile invitée. Convaincue par Amélie, et vu l’hécatombe qui affectent les oiseaux de l’Opéra de Paris, c’était LA
distribution à voir. Par les quelques contacts de l’Opéra de Paris, impossible. Entre les danseurs, la direction et la diplomatie russe, aucune place ne resterait vide. Sur le forum de
Dansomanie, quelqu’un vendait une place mais impossible d’accéder à Dansomanie depuis mon adresse IP (et puis j’allais me prendre une réflexion parce que je ne
poste rien et j’achète une place, blablabla de ce forum…
). Aucun Pass Jeunes ne semblait disponible. Il me reste la queue pour les places à 5 euros. Pour ceux qui ne le savent pas,
j’explique. Tous les soirs, il y a exactement 62 places à 5€ à Bastille. Officiellement, on peut les prendre une heure avant le spectacle vers 18h15. Il faut payer par carte
bancaire ou en pièces et c’est limité à 2 par personne. Ça c’est sur le papier. Dans la réalité, si vous arrivez après 16h vous n’aurez pas de places. Hier la première personne est arrivée à
13h30. Ensuite, elle distribue des petits numéros pour qu’on s’y retrouve. Voilà, alors j’étais 19ème (et donc assurée d’avoir une place) et j’étais avec E*** en phase de congélation. L’ambiance
est bonne jusqu’à ce que la nuit commence à tomber. Là on tente de se réorganiser et c’est la pagaille. Qui a le numéro 5 ? le 18? le 13? personne pour le 13? Il y a ceux qui ont pris un ticket
il y a deux heures, qui sont allés se boire un café au chaud et qui reviennent comme des fleurs. Je m’en fiche, je suis 19ème et je verrai la Russe. Deux américains sont là, je retravaille mon
anglais. Je change de chaussures pour sauver mes orteils et ma voûte plantaire (10cm de talon c’est joli mais ça fatigue). Toujours avoir une paire de Repetto dans le sac! Les portes ouvrent,
alléluia! Et non là c’est encore la galère, oui parce que la machine ne prend pas les billets, vite faire de la monnaie. Ouf, la jeune femme du bar, très sympa, me fait ça avec le sourire. Ça y
est j’ai deux places pour voir la belle Russe. Objectif 1, s’asseoir, objectif 2, rester vigilant à l’ouverture des portes pour pouvoir se placer devant. Les deux objectifs atteints, je peux
souffler.


Uliana Lopatkina par Anne Deniau© Anne Deniau


Le problème quand on vous dit que c’est LE cygne à voir, la meilleure danseuse, vous en attendez beaucoup. Un peu comme au cinéma « va voir ce film c’est
extraordinaire, je m’en suis pas remise, etc » et que du coup, c’est bien mais sans plus. Là ce n’est pas le cas, ce n’est pas bien mais sans plus, c’était génial mais avec des bémols.

Mon premier bémol n’a rien à voir avec le ballet mais avec la salle. Faut le dire en quelle langue, qu’on n’a pas le droit de prendre des photos? Et vas-y que
j’utilise le flash et j’allume mon portable, je l’éteins, je l’allume, je l’éteins! Ahhh mais ça ne vous émeut pas ce qui se passe sur scène, faut-il que vous fixiez tout sur des pixels?! Moi je
suis absorbée et très gênée par tous ces flashs et autres lampes oranges fixatrices. De toutes façons, elles seront toutes floues vos photos, bande de spectateurs inattentifs! Je trouve donc la
salle bien dissipée et le fait d’être située au fond du parterre accentue les sons désagréables.

Oui, oui, c’est promis je vais vous parler du ballet… Le premier acte est plutôt réussi avec un corps de ballet qui, malgré l’épuisement des deux
semaines passées, nous offre encore un spectacle de toute beauté. Quelques erreurs dans la danses des coupes, mais qui ne me gêne vraiment. José Martinez est solide, il
m’apparaît tout de suite dans la maîtrise de ce rôle qu’il connaît si bien. Stéphane Bullion semble à l’aise lui aussi dans ce rôle noir, mais moins maléfique que Stéphane Phavorin, que j’avais trouvé bien meilleur. J’adore le passage où
les deux hommes dansent ensemble, les déséquilibres dans les tours sont parfaitement réussis. Dans le pas de trois, prestation absolument impeccable d’Emmanuel Thibault qui nous offre des sauts avec une amplitude incroyable. Ludmila Pagliero est une danseuse
avec un charisme débordant, qui prend tout l’espace scénique quand elle danse. Quant à Eve Grinsztajn, je suis accrochée à ses bas de jambes et à sa batterie. J’ai l’impression d’entendre le
petit frottement des chaussons à chaque entrechat six. Bravo à ce trio pour cette touche de fraîcheur et de légèreté. Ils m’ont enchantée!

Le cygne entre et le public, ému, hésite quelques secondes, puis applaudit l’étoile venue de Moscou. Ulyana Lopatkina n’est pas un cliché russe.
J’ai une image de tissu quand je la vois, oui, de mousseline, de plume. C’est même gustatif, on pourrait imaginer une mousse de lait qu’on frôle des lèvres. Elle frôle de ses plumes le prince et
l’envoûte immédiatement. Ses bras sont juste légers, pas de caricature d’oiseau, ici, il n’est pas question de cela. Chaque mouvement si travaillé évoque avec finesse l’oiseau sans effacer la
princesse. Et quelle princesse elle fait ! C’est impeccable, elle a la suspension qu’ont de façon si magique les Russes, n’en fait pas trop avec les jambes, (qu’elle a très belles). Ulyana
Lopatkina ne fait pas d’erreurs techniques, mais si elle n’était que simple acrobate, le charme n’opérerait pas. Or, la sensation que je vis est bien différente de l’épatement d’une prouesse
physique. Je vois de la poésie pure sur la scène de Bastille. Le partenariat avec José Martinez se passe bien, pas d’hésitation, ni de discordances. Allez je pose mon bémol… Le rythme. Je trouve
que dans le Pas de deux, notamment dans les sauts portés avec les développés, le rythme a été ralenti, et cela m’a beaucoup gênée de devoir attendre la note. On voit avec merveille la jambe se
développer, mais je trouve qu’on en oublie l’accent vers le bas, si important dans le Lac dont nous avait parlé Patrice Bart. Dans le Lac, tous les accents sont vers le sol, car le cygne
n’est pas vraiment un cygne mais une princesse-cygne et le prince ne veut pas qu’elle s’envole, il la retient au sol. Dans la coda, elle n’a pas repris les bras de Noureev qui pendant le passage
de batterie avec les échappés doivent descendre par devant en étant croisés. J’aime ce  moment car il faut gérer la nuance entre la légèreté des entrechats et des échappés et les bras qui
doivent appuyer dans l’espace. C’est, pour moi, le passage passionnel, celui dans lequel Odette prend confiance en cet amour, et là, j’ai trouvé qu’il manquait d’appui. Les bras sur le côtés
restent dans cette légèreté des sauts et je trouve cela dommage.

Le corps de ballet est, malgré la fatigue, de toute beauté. Je trouve les petits cygnes mieux que le 2/12 même si cette histoire de tête très mécanique me gêne encore. Les
sauts de chats sont plus développés, parce que les sauts de chat qui ressemblent à des soubresauts, très peu pour moi. Les grands cygnes, toujours aussi parfaits.

LPH0808026-copie-1.jpg

© Laurent Philippe / fedephoto.com

 

Entracte, juste de quoi me remettre de mes émotions et de mes frissons. Quelques conflits de places et gênes me sortent de mon conte de fée. Je
n’aime pas sortir de mon conte de fée. Je n’aime pas les entractes !


L’acte III nous replonge dans une ambiance festive avec les danses traditionnelles. Notons les prestations impeccables d’Allister Madin et
d’Héloïse Bourdon dans les Czardas, de Ludmila Pagliero, d’Eve Grinsztajn, de Florian Magnenet et Audric Bézard dans la danse espagnole, et d’Eléonore Guérineau et Adrien Bodet dans la danse
napolitaine. Ce petit tour d’Europe est un divertissement charmant qui prépare à l’arrivée d’Odile. Le cygne noir entre avec Rothbart, et les petits pas de ses bas de jambes nous montrent tout de
suite l’empressement de la ruse. Une fois de plus, rien à dire, les variations sont exécutées avec brio. Quelques déséquilibres pendant les fouettés où elle part très vite (2 simples, 1 double),
mais le rythme ne tient pas. Peu importe je ne suis pas une puriste de la technique. J’aurai voulu par contre une Odile encore plus maléfique, encore plus dans la double face, car je ne crois pas
à ce moment à la naïveté du prince. Stéphane Bullion est très bien dans l’interprétation de son rôle mais fragile dans le début de sa variation. J’ai eu peur qu’il se blesse ou même qu’il tombe
tant sa première réception était fragile. Le manège de grands jetés me fait oublier cette mésaventure du début de la variation.


L’acte IV est définitivement le plus beau parce que les formes géométriques qu’il donne à voir sont si complexes, et si bien réalisées par le corps
de ballet que cela me laisse sans voix à chaque fois. J’aime la version Noureev qui est si tragique. Les cygnes sont dans une matière bien plus dure, l’air prend une place bien plus imposante.
Ulyana Lopatkina signe là aussi son plus bel acte. Elle ne sera plus jamais une princesse et ses bras ne sont plus simplement une évocation de l’oiseau, mais de jolies ailes qui pleure un amour
perdu et une condamnation à une sort tragique. Mes frissons reviennent, les larmes montent, oui le Lac des cygnes est bien le plus beau ballet au monde.


Pas de photos, dans ma précipitation, je l’avais oublié à la maison. Pour les photos des saluts, je vous donne rendez vous sur les autres blogs. A la sortie des
artistes, un petit bonjour à Allister Madin, puis au chaud je retrouve mes acolytes blogueuses. Amélie, Fab, Pink Lady, et Mimy la souris sont là et c’est avec des grands sourires que nous attendons les
artistes. Après une heure, José Martinez sort, et mon courage m’abandonne. Faire la queue toute la journée, moi qui aime tant me faufiler, ce n’est pas jouable. D’ailleurs Mimy est déjà partie.
J’entame alors ma phase de décongélation aux Associés où une bonne partie des danseurs festoient après ce Lac. Mathilde Froustey est assise juste derrière moi avec sa nouvelle coupe
encore plus courte, qui lui va très bien. J’ai une petite pensée pour Palpatine du
coup. Je rentre en pensant à ce Lac si beau, avec cette ballerine si belle sans oublier le corps de ballet sans qui le cygne n’aurait aucun reflet dans l’eau.

 

   Il faut voir absolument les photos d’Anne Deniau, suivez le lien..

 

BALLET EN QUATRE ACTES
SUJET DE VLADIMIR BEGICHEV ET VASSILI GELTSER
Piotr Ilyitch Tchaikovski Musique
Rudolf Noureev Chorégraphie et mise en scène
(Opéra national de Paris, 1984),
d’après Marius Petipa et Lev Ivanov
Ezio Frigerio Décors
Franca Squarciapino Costumes
Vinicio Cheli Lumières
  • Distribution du 21 décembre 19h30
ODETTE / ODILE Ulyana Lopatkina
LE PRINCE Jose Martinez
ROTHBART Stéphane Bullion
LA REINE Béatrice Martel
LE PAS DE TROIS Eve Grinsztajn
Ludmila Pagliero
LE PAS DE TROIS Emmanuel Thibault
SOLISTE CZ Héloïse Bourdon
SOLISTE CZ Allister Madin
SOLISTE ESP Eve Grinsztajn
Ludmila Pagliero
SOLISTE ESP Audric Bezard
Florian Magnenet
SOLISTE N

Eléonore Guerineau

 

SOLISTES N

Adrien Bodet

 

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Озеро лебедей d’Ulyana Lopatkina:
 

 

Cela n’a pas été facile d’obtenir le Sain …

3 réflexions au sujet de “Озеро лебедей d’Ulyana Lopatkina

  1. palpatine says:

    Fallait biser Mathilde pour moi, voyons !  :p

  2. Fée Dragée says:

    Merci pour cette belle chronique où on vit avec vous le spectacle !

    A très vite !

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